Vous êtes ici

Deux enceintes romaines. Le Mans

La capitale des Aulerques Cénomans prit le nom de Suindunum sous l'occupation romaine et se développa largement aux Ie et IIe siècles après J.-C. Les invasions du IIIe s.1 contraignirent les habitants à se réfugier à l'abri de l'enceinte d'un castrum.

Le castrum protégeait l'extrémité du plateau de Sargé qui domine la Sarthe. Construite entre 284 et 305, l'enceinte dessine un rectangle allongé nord-sud, d'environ 1 km 400 de périmètre (450 m x 250 m). Mais le côté est subit plusieurs irrégularités, et le petit côté nord est convexe. Elle fut construite à la hâte, remployant les matériaux de bâtiments condamnés pour l'occasion, comme de nombreuses enceintes édifiées à cette époque et sous la même pression.

Le mur n'a pas de véritables fondations : il repose sur un soubassement de plusieurs assises de gros blocs empilés. Certains de ces blocs de remploi sont décorés d'une bordure, d'autres d'un décor en arcs de cercles imbriqués. Le mur est d'un petit appareil de moellons assez régulier : trois lits de briques séparent deux ensembles de cinq assises réglées.

Le front de la rivière, à l'ouest, est le mieux conservé. Le côté nord est à peu près parallèle à la nef de la cathédrale. Le côté est en traverse le chœur et se poursuit de façon rectiligne, avant de former un angle rentrant qui correspond à la rue des Fossés St Pierre. La jonction des côtés est et sud est elle aussi irrégulière : elle coupe la rue des Boucheries, forme un angle rentrant, coupe la rue de la Truie Qui File, et gagne enfin l'angle sud-ouest du castrum.

Le côté ouest avait trois portes principales, la Grande Poterne, la Poterne du Tunnel et la Poterne de Gourdaine ; elles donnaient sur des voies est-ouest qui traversaient le castrum et menaient aux trois portes correspondantes du côté est, la porte Principale, la Poterne du Doyenné et la Posteriola. La Petite Poterne du côté ouest était aussi en relation avec une voie, mais n'avait pas de symétrique sur le côté est. Sur les côtés nord et sud de l'enceinte, de petites portes débouchaient sur la via sagularis à l'est et à l'ouest : la Porte St Benoît à l'angle sud-ouest, la Porte du Cavalier dans l'angle nord-ouest, la Porte de l'Evêché dans l'angle nord-est et la Porte sous St Pierre la Cour dans l'angle que fait l'enceinte à la hauteur de la rue des Fossés St Pierre.

Les tours, plus nombreuses en bordure de la Sarthe, sont de formes variées, hexagonales (Tour des Pans de Gorron), outrepassées (Tour de Lestang, Tour de Tucé, Tour du Vivier) mais le plus souvent semi-circulaires (Tour Madeleine).

L'aspect le plus inattendu de cette enceinte d'urgence est le soin apporté à la décoration du parement extérieur. On a joué de la différence de teinte des moellons pour composer un décor géométrique bicolore, différent pour chaque ensemble de cinq assises : losanges, chevrons, cercles, sabliers, lignes obliques, triangles sont aussi repris sur les tours et forment de grandes compositions (Tour de Madeleine, Tour des Pans de Gorron et le mur entre elles). En plusieurs endroits sont conservées des baies qui participent à l'ornementation : fenêtres de la Tour du Vivier et de la Tour Madeleine, avec leurs arcs en plein cintre fait de moellons clairs séparés par deux briques posées de chant, arc entièrement en briques de la Grande Poterne.

  • 1. Les Francs et les Alamans prennent la ville en 276 ; des colons barbares s'y installent en 287.

Référence à citer

Marc Heilig, Deux enceintes romaines. Saverne, archeographe, 2003. https://archeographe.net/Deux-enceintes-romaines