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Le renouveau du XVIIIe siècle

Hormis St-Sauveur, qui avait alors disparu, ces monastères profitèrent amplement de l'élan classique qui fleurit en France à partir du XVIIe s. La façade de la grande église de St-Dié fut élevée entre 1711 et 1714. Monumentale et massive, elle est l'œuvre de l’architecte italien Giovanni Betto : un avant-corps à fronton encadré par deux tours à bulbe. A Étival, l'architecte Nicolas Pierson réalisa la façade du sanctuaire en 1726 ; plaquée contre la façade précédente, elle comportait à l'origine deux tours1. Le style classique est ici beaucoup moins rigide qu'à St-Dié : on y joue fort heureusement avec les éléments de l'architecture antique, rinceaux, frontons, niches et chapiteaux ioniques ou corinthiens. Les stalles de bois sculpté du chœur représentent le principal aménagement intérieur de l'époque.
Le monastère de Senones fut entièrement reconstruit au XVIIIe s., d'abord sous l’abbatiat de Dom Calmet (1728-1757), puis sous celui de son successeur Dom Fangé (1757-1784). Les bâtiments que l’on voit aujourd’hui datent tous de cette période, à l’exception de l’église, rebâtie au XIXe s. sur un côté du cloître, et de son clocher. Ce bel ensemble architectural  conserve la disposition bénédictine des bâtiments. Le style, élégant mais pondéré, affirme la puissance et la richesse de cette abbaye. Elle est alors à son apogée : Jean Lamour, qui travailla pour le duc Stanislas, y réalisa la rampe en fer forgé de l'escalier monumental.
L'abbaye de Moyenmoutier connut elle aussi une complète reconstruction à partir de 1765, sous l’avant-dernier abbé Dom Barrois2. On peut aujourd’hui admirer la majestueuse façade classique de l’église car on l'a récemment dégagée du bâtiment industriel qui l'occultait. L’intérieur comprend une nef à couverture en berceau de quatre travées, un transept carré à coupole et un chœur à cinq pans. Seuls le décor et l’autel baroques confèrent à ce simple vaisseau son aspect grandiose. Les superbes stalles en chêne massif datent de la fin du XVIIe s. ; elles sont ornées de bas-reliefs et de sculptures d’un art délicat. Plusieurs châsses ouvragées, dont celle de saint Hydulphe, sont exposées dans l’église.

Les moines, il faut le reconnaître, ont toujours su choisir où établir leurs abbayes. Avec la belle saison qui approche, les visiter fera de belles randonnées dans le piémont lorrain des Vosges.



  • 1. La tour nord a été détruite en 1944. Ces deux tours ont été construites dans une seconde phase mais appartiennent sans doute déjà au projet de Pierson.
  • 2. Son oncle et prédécesseur, Dom Belhomme, l’avait pourtant reconstruite 60 ans plus tôt.

Référence à citer

Marc Heilig, La Sainte Croix des Vosges, archeographe, 2014. https://archeographe.net/sainte_croix_vosges