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Quelques mots d’histoire

Selon la chronique d’Ebersmunster (XIIIe s.), l’abbaye fut fondée au VIIe s. sur les ruines d’un temple de Mercure par le duc Adalric, père de sainte Odile ; son organisation fut confiée au moine irlandais Déodat. Sanctifiée par des reliques de saint Maurice, elle fut richement dotée et suivit d’abord la règle de saint Colomban, avant d’adopter celle de saint Benoît au cours du VIIIe s. Louis le Pieux l’éleva au rang d’abbaye d’Empire en 818 mais, à la fin du IXe s., le roi Arnulf1 la plaça sous la tutelle des évêques de Strasbourg. Face à cette puissante autorité, les moines d’Ebersmunster parvinrent toutefois à conserver le droit d’élire leur abbé et sauvegardèrent ainsi leur indépendance. En 1791, la Révolution dispersa la petite communauté de religieux ; leurs bâtiments conventuels furent en partie détruits et leur église devint celle du village2.

Des phases antérieures à l’état actuel, nous ne savons que peu de chose. Selon toute vraisemblance, le bâtiment a pourtant dû traverser tous les styles d’architecture. Détruit en 1632, au cours de la guerre de Trente Ans, il était à nouveau en service vingt ans plus tard. L’abbé Bernard Roethelin (1675-1715) mit en chantier, après 1670, une nouvelle église qui fut terminée en 1683 : il en subsiste aujourd’hui le chœur à cinq pans et la tour de chevet.

En 1709-10, l’architecte Peter Thumb3 éleva les deux tours de la façade : de base carrée, elles deviennent octogonales au troisième niveau et sont couronnées d’une toiture en bulbe. Puis, entre 1725 et 1727, sous le gouvernement du prieur Ildéfonse Beck, l’architecte reprit presque entièrement l’édifice : il conserva le chœur et la façade, reconstruits peu auparavant, et éleva la nef et le transept que nous connaissons4. La nouvelle église fut consacrée à Noël 1730.

Les travaux avaient été menés rapidement. En 1727, le gros-œuvre à peine achevé, on entreprenait la décoration et l’aménagement intérieurs ; la majeure partie en était terminée en 1733. Les fresques des plafonds, d’inspiration baroque, sont pleines de couleurs et de mouvement sans jamais céder à l’outrance. Cette modération se voit déjà dans les stucs, qui forment un cadre discret aux peintures qu’ils accompagnent. Réalisés par Jakop Machoff en 1727, ils s’inspirent de l’art français de l’époque, très apprécié par les artistes d’outre-Rhin. Ces moulures sont d’une grande diversité et réalisées avec beaucoup d’élégance. La majeure partie se détache en gris sur le blanc du plafond, mais certaines, à la croisée et au chœur, sont richement colorées.


  • 1. Arnulf de Carinthie (vers 850-899), petit-fils de Louis II de Germanie, neveu et successeur de Charles le Gros, fut roi de Francie orientale et empereur d’Occident de 896 à sa mort.
  • 2. A l’intérieur de l’église sont exposés plusieurs panneaux explicatifs, ainsi qu’une maquette du monastère. Toutefois, on obtiendra une information plus complète dans le petit ouvrage intitulé Ebersmunster. L’église abbatiale et paroissiale édité par la Paroisse Saint-Maurice d’Ebesmunster, Schnell Guides d’art n° 821,  Éditions Schnell & Steiner 2013. Ce livret est en vente au fond de l’église pour quelques euros.
  • 3. Originaire du Voralberg, Peter Thumb (1681-1766) a surtout travaillé dans le sud de l’Allemagne et en Suisse. Il fut le gendre et le collaborateur de l’architecte Franz Beer, dont il s’est largement inspiré. Après l’église d’Ebersmunster, qui établit en quelque sorte sa notoriété, Thumb s’est illustré avec celles des abbayes de Birnau (1747-50) et de Saint-Gall (1755-58).
  • 4. En 1725, il avait fallu détruire la nef ; elle avait été endommagée par la foudre. Entre 1720 et 1726, Peter Thumb travailla aussi aux bâtiments conventuels d’Ebersmunster.

Référence à citer

Marc Heilig, Les fresques de l'église d'Ebersmunter, archeographe, 2023. https://archeographe.net/fresques_eglise_ebersmunter