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Période romaine

L'aménagement du territoire

Le territoire des Leuques, à la fin de La Tène1, couvrait le sud des départements de la Meurthe-et-Moselle et de la Meuse, ainsi que la majeure partie de celui des Vosges. Il était bordé par les Rèmes à l'ouest, les Lingons au sud-ouest, les Séquanes au sud, les Raurarques à l'ouest, et les Médiomatriques au nord. Avec ces derniers, les Leuques ont peut-être entretenu des rapports privilégiés : il semble qu'ils aient eu une monnaie commune. Leur capitale est sans doute l'oppidum de Boviolles, dans la Meuse. Mais les remaniements territoriaux qui suivent la guerre recentrent les territoires des Trévires, des Médiomatriques et des Leuques sur la vallée de la Moselle, qui devient l'axe majeur de communication entre Rhin et Méditerranée.

Avec la Pax Romana, les sites défensifs de hauteur perdaient leur intérêt. Les Leuques, comme d'autres peuples gaulois, choisirent d'établir leur capitale en plaine. Où se trouvait-elle ? A la fin du Ie s. av. J.-C., Nasium2, l'agglomération en plaine au pied de l'oppidum de Boviolles, se développe progressivement au détriment de celui-ci. Plus central toutefois dans le territoire de la cité, le site de Toul jouissait d'une situation au bord de la Moselle et sur le cours de la voie d'Agrippa. La question de la capitale des Leuques à l'époque romaine a longtemps agité les esprits. En effet, Ptolémée, qui fait suivre ordinairement le nom d'une cité de celui de sa capitale, mentionne pour la cité leuque Nasium et Tullum3. La découverte d'une inscription datée de 40 / 42 ap. J.-C. a mis fin à ces spéculations. Sur ce fragment de tablette de cire4, en effet, on peut lire : Tul(l)o Loucoru(m) Albano medico. Soit : de Toul des Leuques, à Albanus, médecin. Toul avait donc déjà statut de capitale à cette époque5. Malheureusement, l'histoire mouvementée de la ville a fait disparaître une grande partie des traces de la cité antique. Celle-ci avait été implantée dans le delta que faisait alors l'Ingressin en se jetant dans la Moselle. Les aménageurs romains lui avaient sans nul doute donné un aspect monumental, avec tous les bâtiments que devait comporter une capitale : temples, forum, bains etc. En témoignent des bases de colonnes avec tore que l'on a retrouvées alignées Place du Marché aux Poissons. Tambour de colonne. ToulÉlément architectural. Toul.Tuile à rebord avec marque de la XVe Légion. Toul.Tuiles à rebord avec marque C LEVC. Toul.Tuile à rebord avec marque C LEVC. Toul.

En matière de communications, les Romains développèrent les infra structures existantes et en créèrent de nouvelles. Leur réseau routier empruntait les plaines et les vallées. Tout d'abord, la grande voie d'Agrippa, venant de Langres, traversait Toul, puis gagnait Dieulouard et, au delà , Metz en territoire médiomatrique. Une autre voie quittait Langres pour Strasbourg, passant au sud de Vittel, joignait St-Dié La Bure avant de traverser les Vosges. La voie de Langres à Reims, passant à l'ouest de Grand, traversait Naix, où elle faisait un coude vers l'ouest et Reims. Une voie transversale allait de Toul à Naix. Le territoire leuque était ainsi sillonné de routes. Ce réseau s'inscrivait dans un contexte régional plus vaste6.

Le territoire leuque dans le réseau routier régional.

Les voies fluviales n'étaient pas en reste. Elles permettaient le transport de pondéreux plus aisément que les routes. Le trafic devait être assez dense sur la Moselle et la Meurthe, voire sur des cours d'eau plus petits comme le Madon. On peut voir au musée une barque fort bien conservée qui fut trouvée à Chaudeney-sur-Moselle. Taillée d'une pièce dans le tronc d'un chêne, elle date du Ie-IIe siècle ap. J.-C. Pirogue monoxyle taillée dans un chêne pédonculé. Ie-IIe s. Chaudeney-sur-Moselle.Pirogue monoxyle taillée dans un chêne pédonculé. Ie-IIe s. Chaudeney-sur-Moselle.

  • 1. La Tène C et D, entre 250 et 25 / 15 av. J.-C.
  • 2. Naix-aux-Forges, dans la Meuse.
  • 3. Cf Ptolémée, Géographie, II, 9, 7. En dehors des Leuques, Ptolémée ne fait ainsi que pour les Raurarques et pour les Ubiens.
  • 4. Il a été trouvé à Valkenburg. Cf É. FREYSSINET, in Gilles HAMM, CAG, La Meurthe-et-Moselle, p. 64 et 361.
  • 5. On pense aujourd'hui que Naix était avant tout un sanctuaire important. Cf Franck MOUROT, CAG Meuse, s. v. Naix-aux-Forges.
  • 6. En particulier si l'on prend en compte l'important réseau routier du pays médiomatrique : la voie d'Agrippa se dédoublait entre Metz et Trèves, de chaque côté de la Moselle. Vers l'est, Metz était reliée à Mayence, ainsi qu'à Strasbourg via Sarrebourg et Saverne. Une voie gagnait les Vosges par la vallée de la Seille, en bordure du pays leuque. Vers l'ouest, la voie de Metz à Reims passait par Verdun, d'où une route gagnait Arlon et une autre la voie d'Agrippa de la rive gauche de la Moselle.