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Historique

L'église ne représentait pas une priorité immédiate dans la constitution d'un couvent. Une chapelle provisoire pouvait suffire au culte jusqu'à ce que la communauté soit à même de construire le sanctuaire définitif. Dans le cas du couvent franciscain de Colmar, on le sait désormais, l'église actuelle ne pouvait correspondre à la propriété initiale des Frères Mineurs car l'édifice est construit à cheval sur le premier rempart qui, à cette époque, est encore en fonction1. Divers indices auraient pu permettre de supposer un édifice antérieur2 avant que les fouilles du chœur en 1985 et les sondages dans la nef en 1992 et autour de la chapelle sud-est en 1995 ne viennent corroborer cette hypothèse.

La construction de la nouvelle enceinte (1232-1328) permit aux Franciscains d'envisager l'édification d'un sanctuaire beaucoup plus vaste. Pour cela ils achetèrent, en 1296, un premier terrain au noble seigneur Kuno von Laubgassen pour 12 marks d'argent, alors qu'ils avaient déjà construit, comme le mentionnent les Annales, « les hautes et grandes colonnes de leur église » en 1292. En 1335, grâce à l'intervention de l'empereur germanique Louis IV de Bavière, la ville céda un autre terrain, à l'ouest du couvent. Elle voulait aussi faire payer les empiètements sur la voie publique. La construction de l'église touchait alors à sa fin mais, pour diminuer ceux-ci, les Franciscains renoncèrent à l'alignement de la façade sur la rue. La ville leur vendit ainsi le pignon de l'église avec le portail principal. 

La seconde église est implantée au nord de la première selon un axe un peu différent. Elle est vraisemblablement l'œuvre d'un Frère architecte : à cette époque en effet, les écoles d'architecture des Franciscains sont en plein essor3. Selon Wolff, la conception de l'église respecte dans son plan et son élévation les prescriptions du chapitre général des Frères Mineurs tenu à Narbonne en 1260. Le plan se rattache au type des églises des ordres mendiants du Rhin supérieur. Elle était dédiée, sans doute dès l'origine, à la Très Sainte Trinité4.

Le chœur voûté fut certainement terminé, comme le jubé5 (voir logo), au début du XIVe siècle, avant la nef, plafonnée ainsi que l'exige la règle des ordres mendiants. Cela laisse en suspens une intéressante question : comment les Frères Mineurs ont-ils résolu la continuité du culte dans une église en grande partie détruite et une autre encore inachevée ? Les piliers octogonaux pris dans le mur sud de la nef et dont bases et chapiteaux sont moulurés à l'intérieur et à l'extérieur appartiennent à un second bas-côté sud qui subsistait du premier édifice. Cette seconde nef latérale est aussi attestée par des restes de peinture intérieure qui apparurent sur la façade ouest de la chapelle sud-est lorsqu'on détruisit les bâtiments du vieil hôpital en 1937, et par une arcade découverte sur cette même façade lors des travaux de 1966.

  • 1. les fouilles de mai-juin 1995 ont permis de retrouver la portion du premier rempart enjambé par l'édifice actuel.
  • 2. Par exemple la disposition des piliers octogonaux engagés dans la maçonnerie du mur sud de la nef.
  • 3. Ce fut le cas à Strasbourg, où le Frère Conrad commença en 1281 le chœur de l'église des Franciscains et le termina en deux ans.
  • 4. Et non pas seulement à partir de 1491 comme le dit Wolff 1982.
  • 5. Mais Kraus 1884 le date du XVe siècle.

Référence à citer

Marc Heilig, Le couvent des Franciscains à Colmar, archeographe, 2003. https://archeographe.net/Le-couvent-des-Franciscains-a%2C69