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Historique (suite)

Le cloître figure encore sur les plans du début du XVIIe siècle, sous la forme d'une cour au sud de l'église1. La sacristie se trouvait certainement à l'emplacement de l'actuelle maison du sacristain ; la sacristie actuelle serait l'ancienne salle du chapitre.

La cession du pignon de l'église en 1335 comprenait aussi le mur du cimetière, le long de la Grand Rue, depuis le bâtiment de l'église jusqu'à l'auberge Zum Roten Salmen (au coin de la rue de l'hôpital). Le cimetière des Franciscains était situé au sud de l'église et à l'ouest du couvent. La renommée de celui-ci en faisait un lieu de sépulture recherché, en particulier le cloître, l'église et, lorsqu'il s'agissait d'un généreux bienfaiteur, le chœur lui-même. Certaines corporations avaient coutume de se faire inhumer dans l'église2. De nombreux bourgeois3 et gens de noblesse s'y firent enterrer : on connaît ainsi des membres de la famille des Ribeaupierre4, des Horbourg, des Wittenheim5, les Würmlin de Jebsheim, un noble de Brünighofen.

Le couvent des Franciscains connut donc une grande prospérité, ce qu'attestent de nombreux événements. Le roi de Germanie Frédéric III se reposa chez eux le 9 août 1442 et, couronné empereur, il passa dans leur couvent le 10 septembre 1473, assista à la messe dans leur église le lendemain et reçut les hauts dignitaires dans leur jardin. La foule affluait dans leur église les jours de fête, en particulier le jour anniversaire de la dédicace de l'édifice où étaient invités les Frères de Kaysersberg. Les corporations choisirent l'église pour siège et y firent maintes donations pieuses : tisserands et chapeliers y sont ainsi mentionnés en 1463, tanneurs et pelletiers en 1470 etc.
En 1282, l'évêque de Bâle Henri d'Isny, un Franciscain, ordonna des prêtres dans l'église des Frères Mineurs, accompagné d'une suite importante6. En 1290, les Franciscains tinrent leur chapitre à Colmar. De même, en 1303, 150 religieux se réunirent à Colmar pour un chapitre provincial présidé par le Frère de Ravensbourg7. En 1350, l'assemblée provinciale se tint à l'église et au couvent de Colmar en présence de l'évêque de Bâle Henri d'Isny. Les Franciscains avaient en outre de nombreux béguinages sous leur juridiction8, sur lesquels, comme sur les citoyens, ils exerçaient leur autorité morale et spirituelle9. Pendant les épidémies, ils participaient activement aux processions : on sait qu'ils étaient au moins 40 en 129710 ; ils montraient un zèle inlassable : plusieurs perdirent la vie en soignant les malades lors de la peste de 1313. Comme on peut l'imaginer, leurs rapports avec les autres ordres pouvaient aussi être tendus par les rivalités11.

  • 1. « Colmar en 1720 », AMC ; « Plan de l'église luthérienne et de l'hôpital de Colmar », ADHR Colmar, 101 J 1277/1.
  • 2. En 1961, lors des travaux de canalisation aux alentours de la maison des Arcades, on mit au jour plusieurs squelettes de ce cimetière.
  • 3. Ainsi Martinus Vogel en 1459, Josef Bohner en 1476, Hans Mathissel en 1527, Heinrich Metznfelder en 1536.
  • 4. Ulrich de Ribeaupierre le Vieux et sa femme Elisa, Ulrich de Ribeaupierre le Jeune et, en 1300, sa femme Adelaïde, Suzanne de Geroldseck, femme de Henri de Ribeaupierre en 1308. Richensa, fille d'Ulrich de Rappolstein en 1318.
  • 5. L'épouse du chevalier Jodoc de Wittenheim, à l'entrée du chœur.
  • 6. Gérard et Liblin 1854, Kraus 1884 suivent en cela les Annales, mais Betz 1971 et Wolff 1982 donnent pourtant la date de 1284 pour cet événement.
  • 7. Les Annales rapportent l'événement : « Le chapitre des Frères Mineurs fut célébré solennellement à Colmar vers la Saint Urbain (25 mai), il y avait cent cinquante frères ; les convers et les béghards au nombre de trente parcouraient la ville de Colmar, en demandant l'aumône, disposés en procession sur deux ou trois rangs ».
  • 8. Le plus connu est le Bischofconvent. Conrad Probus, évêque franciscain de Toul, donna en 1280 70 mark à un ancien chevalier devenu économe des Franciscains de Colmar pour fonder un foyer de béguines. Le Bischofconvent était situé Tulengasse, ce qui, déformé en Dahlengasse, donna l'actuel nom de rue de la Corneille.
  • 9. Les Annales mentionnent pour l'année 1286 : « Le jour de Pâques, quelques citoyens de Colmar blessèrent les gens du Schultheiss et les forcèrent, par leur violences, à se réfugier dans le couvent des frères Mineurs ; à la suite de cet événement, ces citoyens furent chassés de la ville, leurs maisons détruites, et leurs biens confisqués par les juges. » Pour l'année 1290 : « Le lecteur des frères Mineurs de Bâle fit prendre, à Colmar, pendant la tenue du chapitre, deux béguines et deux béghards ; il fit aussi arrêter à Bâle deux personnes qu'il regardait comme hérétiques. »
  • 10. Dans les Annales pour 1297 : « Pendant les ravages de la peste et de la mortalité, les chanoines de Colmar ordonnèrent une procession avec exhibition des reliques pour la veille de la Purification. Vers la troisième heure, les religieux et le clergé se réunirent à l'église de Saint Martin ; les écoles et le chapitre en surplis et au nombre de cent vingt marchèrent en tête ; les frères Mineurs, au nombre de quarante, venaient après eux ; les frères Prêcheurs, au nombre de trente, suivaient les Mineurs ; puis venaient dix vénérables frères des Hospitaliers de Saint Jean ; dix moines de Saint Benoît précédaient les frères Prêcheurs ; le reste suivait à son gré.»
  • 11. Dans les Annales pour 1299 : « Un jeune garçon d'environ quinze ans qui avait été reçu comme frère dans l'ordre des Prêcheurs, et qui était resté plus d'un an et demi dans l'ordre et dans la maison de Colmar, apostasia le jour des SS Innocents, sur l'instigation de quelques frères des Mineurs et passa, avec leur aide et celui des béguines leurs adhérentes, dans l'ordre des frères Mineurs. »

Référence à citer

Marc Heilig, Le couvent des Franciscains à Colmar, archeographe, 2003. https://archeographe.net/Le-couvent-des-Franciscains-a%2C69