Le couvent des Franciscains à Colmar

L'historique du site du couvent des Franciscains de Colmar, objet de cet article, comprendra trois parties : le couvent des Franciscains, l'église protestante, et la redécouverte de la première église des Franciscains. Une bibliographie est attachée à cet ensemble1.

 Vers 1216-1220, la ville de Colmar édifie sa première enceinte, sous la direction d'Alfred Woelflin, bailli impérial de Frédéric II Hohenstaufen. Les Franciscains s'installent dans l'angle nord-est de ce rempart, dans la région de la Senfmühle, à une date qu'il n'est pas possible de déterminer avec certitude. Il est assuré qu'ils précédèrent les Dominicains, qui vinrent à Colmar en 1278 : en effet, le 25 mars 1278, l'évêque Otto de Bâle décide que ceux-ci devront suivre la coutume des Minorites déjà établis. Les fondations franciscaines sont fort nombreuses dans la province d'Allemagne de 1221 à la fin du XIIIe siècle2. L'ordre franciscain retient la date de 1246 pour la fondation de l'établissement de Colmar. Toutefois, cela n'exclut pas que les Frères aient été présents bien avant car la question se pose de leur première installation. Présents très tôt à Colmar, les Franciscains n'ont sans doute pas construit immédiatement, mais semblent s'être d'abord contentés de conditions précaires, priant dans les léproseries, et construisant leur couvent peu à peu grâce aux aumônes des bourgeois qu'ils sollicitèrent. Kraus mentionne une Chronique des Franciscains de Colmar qui courait de 1227 à 14543 : c'est sans doute pourquoi certains fixent l'arrivée des Frères à Colmar en 1225, voire en 12234. D'autres historiens préfèrent rester prudents et proposent une datation relative, début ou première moitié du XIIIe siècle. De ce qui fut jadis le couvent des Franciscains, il ne reste aujourd'hui qu'une église. L'ensemble comprenait, ainsi que tout établissement de ce genre, des parties destinées à l'habitat (cellules, dortoirs, salle commune, salle de lecture, scriptorium, cuisine, réfectoire, office... mais aussi résidence du supérieur et hôtellerie), aux communs (réserves, caves, écuries, remises etc.), aux activités économiques et agricoles (moulin, menuiserie, serrurerie, jardins etc.) : ce sont les parties essentielles d'un couvent, celles qui lui permettent de fonctionner. Viennent ensuite l'église, la sacristie, le cloître qui relie l'église à l'habitat, la salle du chapitre enfin. Il faut éventuellement ajouter un espace pour les sépultures.
Nous ne savons rien des bâtiments qui composaient l'habitat puisque ce qu'il en restait fut détruit par l'incendie de 1735. Ils se situaient au sud de l'église. Des locaux économiques et agricoles se trouvaient au sud-est de celle-ci, mais il est vraisemblable que d'autres aient été disséminés en divers endroits de la propriété : la Senfmühle, par exemple, qui servait sans doute au concassage du grain de moutarde, était contiguë au premier mur d'enceinte et à une de ses tours d'un côté, à l'église de l'autre5. Les jardins occupaient l'espace entre le premier rempart et la Lauch : cela avait été rendu possible par l'élargissement, à partir de 1232, du mur d'enceinte afin d'enfermer les faubourgs ouest (Kerkerthor Vorstadt), nord (Deinheimer Vorstadt) et est (Steinbrückerthor Vorstadt) ; Les Frères purent acheter ce terrain en 1298. Aussi, lorsqu'elle affirme que le couvent des Franciscains est achevé en 1290 et qu'il est « un des plus vastes de la province », la Chronique de Thann n'est-elle pas forcément en contradiction avec les autres sources, pour autant qu'elle ne parle pas de l'église.

• 1. La troisième partie et la bibliographie seront publiées ultérieurement.
• 2. Ainsi, pour ne citer que quelques exemples, l'ordre franciscain retient les dates suivantes : en 1221, Mayence, Worms, Spire, Wurzbourg, Regensbourg ; en 1222, Haguenau, Strasbourg, Schwäbisch Gmund ; en 1223, Lindau, Zurich, Bamberg ; en 1224, Nuremberg ; en 1225, Nordlingen ; en 1230, Bâle ; en 1236, Schwäbisch Hall ; en 1237, Esslingen ; en 1240 ; Fribourg en Brisgau ; en 1246, Colmar ; en 1248, Heidelberg ; en 1249, Friedberg ; en 1250, Rouffach. Gatz 1969.
• 3. Cette Chronique n'existe plus.
• 4. Ainsi, Wolff 1982 est pour la date la plus récente et Betz 1971 pour la plus ancienne.
• 5. Les Franciscains la vendirent en 1427 à la Ville pour 40 gulden. On sait que la Monnaie était déjà située en 1538 près du Schlüsselbäechlein et que la Senfmühle servit de siège au maître de la Monnaie en 1574, 1576, 1579, 1582. Plus tard, la Senfmühle devint le presbytère protestant.