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Historique (suite et fin)

Le déclin vint avant tout du mouvement de réforme des observants qui secoua l'ordre franciscain pour le faire revenir à la rigueur de la première règle. Une partie des Franciscains, qu'on appela conventuels, avait accepté du pape Jean XXII un adoucissement du vœu de pauvreté1. Les observants furent définitivement séparés des conventuels par la bulle du pape Léon X Ite et vos in vineam meam, du 29 mai 1517. Les Franciscains de Colmar restèrent parmi les conventuels et l'essor spirituel leur échappa au profit des observants. Il ne faut pas non plus sous-estimer le clivage que fit parmi les croyants l'enseignement de Luther. Le couvent de Colmar connut portant un sursaut certain, lorsqu'au début du XVIe siècle, sous les gardiennats du Père Johann Mentzer2, le célèbre Franciscain Thomas Murner vint y faire des sermons.
Dès la fin du XVe siècle, en 1491, l'état de l'église nécessitait une restauration importante, sans doute une reprise en sous-œuvre. Le Père Mentzer, grâce à une entente plus étroite avec les édiles, chercha à faire prendre en charge par la ville les travaux d'entretien du couvent et de l'église. Il entreprit d'autres réparations indispensables en 1512. On construisit aussi une chapelle voûtée dans le prolongement du second bas-côté sud. La ville consentit ainsi à assumer la campagne de restauration de 1522 à 1537. Ces réparations portèrent sur les encadrements de fenêtres, la couverture de la chapelle Sainte-Anne, le bulbe et le clocher, restaurés par le couvreur Georg Schlachter, les peintures des bas-côtés etc.3 On détruisit le second bas-côté sud, ce qui causa des fissures à l'intérieur de l'église.
En 1525, sous le premier gardiennat du Père Jacob Einfalt, il ne restait que cinq religieux dans le couvent des Minorites4. Sous le mandat de son successeur Blasius Kern5, Jacob Einfalt, prédicateur recherché, fut appelé à la cathédrale de Wurzbourg pour y prêcher. Pour son second mandat6, Jacob Einfalt se fit remplacer par le vicaire du couvent Antoine Feist et, avec l'autorisation du Conseil de Colmar, retourna à Wurzbourg, d'où il ne devait jamais revenir. En 1539, un échange de lettres soutenu entre le Conseil de la Ville, le Provincial et le gardien Jacob Einfalt témoigne de la gravité de la situation. Malgré cela, le chapitre de la cathédrale de Wurzbourg fit tout pour retenir Einfalt7. Lors de la terrible épidémie qui s'abattit en 1541 sur Colmar8, les religieux franciscains périrent tous, victimes de leur dévouement à soigner les malades. Le Conseil de Colmar réitéra sa prière auprès du Père Einfalt ; mais, en dépit de l'abandon dans lequel se trouvait désormais le couvent, les chanoines de Wurzbourg refusèrent de libérer le gardien. En 1542, peu après la mort du dernier religieux, on fit un inventaire du mobilier du couvent en vue de sa cession à la Ville. Mais le Conseil, qui tendait déjà au protestantisme, ne tenait plus à ce qu'il fût réoccupé et refusa la proposition du Provincial d'établir à Colmar deux Pères de Thann. Le 9 novembre 1542, le Conseil attendit encore en vain la venue de Jacob Einfalt. Trop faible pour se déplacer, celui-ci décéda le 19 juillet 1543. Le 7 novembre 1543, le Général de l'ordre franciscain céda le couvent et ses dépendances en assez mauvais état à la Ville de Colmar. Le contrat fut conçu sous forme de don, signé par le Provincial Barthélémy Hermann et par les délégués qu'il avait consultés. En dédommagement des droits, l'ordre reçut 2400 florins. Dans le couvent désaffecté, la Ville installa son hôpital et l'église servit9 à l'office qui était dit pour les pauvres, les malades et les enfants de l'hôpital. Les fondations et redevances des corporations attachées à l'église furent reprises pour la chapelle. Il fut décidé plus tard que l'hôpital devait recevoir les biens du couvent10, à l'exception de la bibliothèque, des vases sacrés et du linge. L'achat du couvent par la Ville fut ratifié par une bulle du pape à Augsbourg en 1554.

  • 1. Ad Conditionem, du 8 décembre 1322.
  • 2. Le Père Mentzer est gardien en 1501, 1507, 1510, 1515, 1516, 1518.
  • 3. Afin de financer ces réparations, on eut recours à dix cardinaux pour des lettres d'indulgence de cent jours.
  • 4. Guillaume Steib, Jacob Einfalt, Grégoire Edelmann et Pantaléon Lempter, ainsi qu'un Frère étranger d'Augsbourg, Anton Seyller.
  • 5. De 1536 à 1538.
  • 6. De 1538 à sa mort en 1543.
  • 7. Majoration de son salaire, qui passe de 80 gulden à 150, confirmation du poste pour cinq ans, garantie d'assistance en cas de maladie.
  • 8. Elle fit 3500 victimes à Colmar, ainsi que le rappelle une inscription à Saint Martin.
  • 9. Selon Wolff 1982, la chapelle resta désaffectée jusqu'en 1568. Betz 1971 dit étrangement qu'en 1568, l'église de l'hôpital était fermée depuis 1543.
  • 10. Barthélémy Hermann en reçut quatre fuder de vin, ce dont il s'estima suffisamment payé.

Référence à citer

Marc Heilig, Le couvent des Franciscains à Colmar, archeographe, 2003. https://archeographe.net/Le-couvent-des-Franciscains-a%2C69