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Les images d'une ère de progrès

Malgré l’alliance, étrange mais révélatrice de l’esprit de l’époque, de la Guerre et de l’Industrie au fronton du balcon impérial, les succès de l’économie allemande apparaissent en de multiples endroits et sous diverses formes. La Sidérurgie et la Mine, fleurons de l’industrie lorraine, prennent l’aspect de deux ouvriers munis des outils de leur profession au faîte de la façade de l’entrée. Le commerce, associé à l’industrie, est symbolisé par une roue ailée qui fait une heureuse transition, au pied du clocheton de la tour et à la fin des toitures, entre des éléments architecturaux différents ; elle est encore l'élément principal du décor modelé à la base du plafond de la salle des guichets. Un peu partout, l’essor des moyens de transports apparaît sur les chapiteaux : sur les colonnettes de la fenêtre du bas de la tour et dans la salle des pas-perdus (caravane, bateau, auto, locomotive, zeppelin, navires...). La domestication des énergies, un des grands progrès du temps, est évoquée par les éclairs d'électricité à l’entrée du générateur électrique ou, entre les portes du hall d’entrée, par la surprenante image du cheval-vapeur en étalon fulminant.

Un certain nombre de sculptures se rapportent à la fonction de gare de voyageurs. Et avant tout le chef de gare, qui est peut-être représenté sur une face des chapiteaux de la fenêtre du rez-de-chaussée de la tour. Sur la façade du local d’enregistrement des bagages, situé à gauche de la salle des guichets, sont figurés les employés qui travaillaient à ce service : bagagistes sur le tympan de la fenêtre et porteurs en console des pilastres qui encadrent la baie ; à l’intérieur de cette salle, certains chapiteaux sont ornés d’un cadenas et d’une clef, sans doute en rappel des serrures des bagages.

D’autres agents peuplent la façade du bâtiment des services, au sud de la sortie de la gare. Sur les chapiteaux des colonnes géminées des fenêtres, ils sont représentés en double, de part et d’autre des attributs de leur état : le porte-faix avec sa charge, le médecin de la gare avec le caducée, le télégraphiste et la bande télégraphique, l'agent retraité fumant la pipe et le caissier comptant son argent.

Le couloir des pas-perdu a toujours été un endroit très animé. Là se croisent les voyageurs sur le départ ou en transit, ceux qui arrivent et ceux qui les attendent. A une époque où voyager prenait du temps, ces gens devaient pouvoir trouver les commodités indispensables de la vie courante. Les divers services qu'offrait la gare sont symbolisés sur les chapiteaux des portes1 : des ciseaux pour le salon de coiffure, des douaniers pour le local de la douane, car Metz était désormais quasiment une ville frontière, des agents pour la consigne, un facteur pour le bureau de poste2... Sur ce corridor donnent encore les salles de restauration. Elles aussi sont indiquées par des bas-reliefs qui reprennent la distinction entre les passagers : houblon, chopes de bière et saucisses pour la 3e classe ; vigne, bouteilles de vin et mets raffinés pour les 1ère et 2e classes.


  • 1. Seuls font exception les locaux des toilettes. Ils étaient certainement indiqués, mais différemment.
  • 2. La grande poste, de l’autre côté de la place, ne fut mise en service qu’en 1911.

Référence à citer

Marc Heilig, La sculpture ornementale de la gare de Metz, archeographe, 2018. https://archeographe.net/sculpture_ornementale_gare_Metz