Vous êtes ici

Jean-Frédéric Oberlin

Auteur(s): 

Une vie tendue vers un seul but

Né à Strasbourg le 31 août 1740, Jean-Frédéric Oberlin étudie au Gymnase, où son père est professeur, puis à l'université de Strasbourg à partir de 17551 . Il a le désir ardent de servir la foi chrétienne, comme il le dit dans un acte de consécration qu'il rédige à 20 ans. Il se forme toutefois dans diverses disciplines, tout en étant précepteur chez un médecin de Strasbourg, le docteur Ziegenhagen. Il est reçu docteur en philosophie en 1763. Plaque commémorative sur la maison strasbourgeoise où est Oberlin.

En 1767, Oberlin vient d'accepter un poste d'aumônier militaire quand le pasteur du Ban-de-la-Roche2, Jean-Georges Stuber, lui propose son poste3. Stuber, durant son ministère, a beaucoup travaillé pour l'éducation de ses paroissiens ; il désire un successeur qui poursuive son action. Oberlin accepte et emménage en avril 1768 au presbytère de Waldersbach. Le 6 juillet, il épouse Marie-Salomé Witter. La famille Oberlin aura 9 enfants. Waldersbach. Peinture à l'huile. XIXe s. Musée Oberlin de Waldersbach.Oberlin restera pasteur au Ban-de-la-Roche durant 59 ans. Reprenant l'œuvre de son prédécesseur, il lui donnera une ampleur extraordinaire. Il s'intéresse à tout ce qui peut faciliter son entreprise de pédagogie et de développement tout en remplissant ses fonctions pastorales. Et s'il est parfois inquiété par la hiérarchie luthérienne de Strasbourg ou par les Révolutionnaires, il poursuit néanmoins son œuvre inlassablement. Sa vie traversa les règnes de Louis XV et de Louis XVI, la Révolution et la République, l'Empire et la Restauration. Une époque de bouleversements politiques, sociaux et culturels. Oberlin meurt en 1826. Sur la fin de sa vie, son œuvre avait été reconnue officiellement.

Il n'est pas aisé de dresser un portrait du pasteur Oberlin. Je suis un étrange composé de qualités contradictoires, disait-il. Sa curiosité le portait à s'intéresser à tout ce qui l'entourait, et il n'hésitait pas à la satisfaire. Il débordait d'une activité surprenante : cette constatation s'impose lorsqu'on découvre ce qu'il a réalisé. Tout cela donne un personnage étonnamment complexe. Il voulait comprendre la Création et conduire ses paroissiens sur ce chemin. Cela passait par tous les domaines de la vie quotidienne, éducation, amélioration des conditions de vie, progrès spirituels autant que matériels. C'est d'ailleurs une préoccupation qui captive tout le siècle. Toutefois, contrairement à Rousseau, dont l'Émile eut des effets désastreux sur les enfants qui furent soumis à ses principes, la démarche d'Oberlin reste concrète, toujours modifiée et validée par le terrain.

Portrait de J.-F. Oberlin. Musée Oberlin de Waldersbach.

L'intérêt d'Oberlin pour les sciences laisse entrevoir certaines dérives de son esprit et de son action. Il faut bien en dire un mot, bien que cela paraisse aujourd'hui dérisoire en comparaison de ce qu'il a réalisé pour le bien de ses paroissiens.

Liste des "blâmables" établie par Oberlin. Musée Oberlin de Waldersbach.Liste de "ceux qui tiennent des chiens". Musée Oberlin de Waldersbach.

D'une part son mode de pensée, formé au piétisme, glisse facilement vers l'irrationnel, le mysticisme, voire la superstition ; d'autre part, en classant ses paroissiens, il établit des listes de bons et de mauvais sujets, selon une tendance de son caractère à l'autorité. Le despotisme éclairé est d'ailleurs un mode de gouvernement en vogue au XVIIIe siècle.

Liste des "femmes et des filles qui s'opiniâtrent à partager les cheveux sur le sommet de la tête". Musée Oberlin de Waldersbach.Affiche pour "inviter à donner au pasteur les noms des garçons qui à l'Église se comportent comme des polissons". Musée Oberlin de Waldersbach.

  • 1. Le lecteur intéressé lira avec profit l'excellente étude que Loïc Chamel a consacrée au pasteur Oberlin : CHALMEL Loïc, Oberlin, le pasteur des Lumières, Éditions La Nuée Bleue / DNA, Strasbourg 2006.
  • 2. Le Ban-de-la-Roche regroupe les territoires de Waldersbach, Fouday, Belmont, Bellefosse, Solbach, Trouchy, Bambois et La Hutte. Il s'étage sur le versant ouest du massif vosgien, entre la vallée de la Bruche (410 m) et le Champ-du-Feu (1100 m).
  • 3. Stuber venait d'être affecté à la paroisse Saint-Thomas de Strasbourg.