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Déclin et destruction

Dans la première moitié du IIIe s., le pouvoir impérial est affaibli par des luttes incessantes. Rome n’est plus en mesure de contenir les Barbares, qui déferlent sur le territoire de l’Empire. L’est de la Gaule en a beaucoup souffert. A Deneuvre, le sanctuaire est délaissé : les habitants se replient sans doute sur les hauteurs, où s’étaient établis des potiers dont on a retrouvé les dépotoirs. Il semble pourtant que la fréquentation n’ait jamais entièrement cessé et qu’elle reprenne à partir du milieu du siècle. Le site est incendié en 275, lors de l’invasion des Alamans. Le culte d’Hercule retrouve la faveur impériale avec la Tétrarchie (286-305), qui insiste sur la relation entre le dieu et son père : Dioclétien (Jupiter) adopte Maximien (Hercule) comme co-empereur. Ce fut un regain de courte durée puisque le culte d’Apollon supplante tous les autres en 310. Sous Constantin (306-337), le sanctuaire de Deneuvre est néanmoins remis en état et voit s’ériger de nouveaux monuments, mais il décline à nouveau par la suite.

Comme beaucoup de lieux de culte en Gaule, il est détruit dans le troisième quart du IVe s., vraisemblablement par les Chrétiens : si Valentinien Ier (364-375) avait su les contenir, leur rage s’abat sur les monuments païens dès son successeur Gratien (367-383). L’hypothèse de la présence de chrétiens à Deneuvre1 repose essentiellement sur la découverte d’une stèle funéraire que l’on pense être chrétienne : elle représente une orante et daterait du IVe s. Quoi qu’il en soit, les découvertes trahissent un acharnement systématique : les effigies du dieu sont martelées et décapitées, les statues sont brisées et renversées, les morceaux en sont dispersés, les édifices sont abattus. Un violent incendie ravage le site, qui est ensuite en partie remblayé.
Le sanctuaire fut abandonné, alors que bien d’autres furent christianisés. Le culte d’Hercule représentait un concurrent trop proche du christianisme, il fallait l’abattre : ce dieu salutaire présentait en effet de fortes analogies avec le Christ, comme le mit en évidence Marcel Simon2. L’endroit fut peut-être même frappé d'interdit. Inondé par les eaux de ruissellement et la boue, envahi par la forêt, il disparut complètement de la vue et de la mémoire des hommes.


  • 1. La présence des Chrétiens est attestée à Metz dans la deuxième moitié du IIIe s., dans la première moitié du IVe s. à Toul et à Verdun. Responsables de la destruction du sanctuaire de l’Altbachthal à Trèves, ils s’en prennent particulièrement aux divinités païennes qui concurrencent le Christ : comme celui d’Hercule à Deneuvre, les lieux de culte de Mithra de Sarrebourg, de Koenigshoffen ou de Biesheim sont détruits de fond en comble.
  • 2. Marcel SIMON, op. cit. On lira particulièrement le chapitre IV, Hercule, rival du Christ, p. 125-165.

Référence à citer

Marc Heilig, Les Sources d'Hercule, archeographe, 2015. https://archeographe.net/sources-Hercule