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Livre premier. Chapitre III.

Départ de Ténériffe. Danger que court le vaisseau près de Bonavista. Isle de Mayo. Port Praya. Précautions contre les pluies & la chaleur étouffante des environs de l'Equateur. Position de la côte du Brésil. Arrivée au Cap de Bonne Espérance. Relâche au Cap. Jonction de la Découverte. Courses de M. Anderson dans l'intérieur du pays. Observations astronomiques. Remarques sur les courants & la déclinaison de l'aimant, durant la traversée d'Angleterre au Cap. 1776.
Août.
Après avoir rempli nos futailles, & embarqué toutes les autres choses dont nous avions besoin, nous appareillâmes de Ténériffe le 4 août, & nous continuâmes notre route avec un bon vent du Nord-Est.

10.
Le 101, à neuf heures du soir, nous vîmes l'Isle de Bonavista dans le Sud, à un peu plus d'une lieue : nous croyions en être beaucoup plus éloignés, mais nous reconnûmes bientôt notre méprise. Ayant marché à l'Est jusqu'à midi, afin d'éviter les rochers couverts, qui gisent à environ une lieue de la pointe Sud-Est de l'Isle, nous nous trouvâmes très-prêts de cet écueil, & nous venions de doubles les brisans. Notre situation fut alarmante durant quelques minutes. Je ne crus pas devoir sonder ; cette opération auroit augmenté le péril, sans offrir les moyens de nous y soustraire : je reconnus que l'extrémité septentrionale de Bonavista est de 16d 13' de latitude Nord & de 22d 59' de longitude Ouest.
Dès que nous fûmes hors des rochers, nous mîmes le cap au Sud-Sud-Est jusqu'à la pointe du jour du lendemain. Le 11, nous marchâmes à l'Ouest, afin de passer entre Bonavista & l'Isle de Mayo : j'avois dit au Capitaine Clerke que je toucherois au port de Praya, & je voulois savoir si la Découverte y étoit arrivée. A une heure après-midi, nous vîmes dans le Sud-Est à trois ou quatre lieues de distance, les rochers qu'on trouve au côté Sud-Ouest de Bonavista.

1776.
Août.
12.
Le 12, à six heures du matin, l'Isle de Mayo nous restoit au Sud-Sud-Est à environ 5 lieues : on jeta la sonde qui rapporta soixante brasses. La déclinaison de l'aimant d'après le résultat moyen de plusieurs Azimuths pris avec trois différens compas, étoit en même-temps de 9d 32' & demie Ouest. A onze heures, l'une des extrémités de Mayo se montroit à l'Est-quart-Nord-Est, & l'autre au Sud-Est-quart-Sud : dans cette position, nous découvrîmes près de la partie Nord-Est deux collines de forme ronde ; on voyoit par-delà une autre grande colline, plus élévée, & à-peu-près aux deux tiers de la longueur de la côte, une quatrième colline à pic, détachée. Du point où nous examinâmes l'Isle, c'est-à-dire de trois ou quatre milles, aucune apparence de végétation ne frappa nos yeux ; & nous n'y apperçumes que cette couleur brune & inanimée qui domine dans les terres où il n'y a point de bois.
M. Nicholson dit, dans la préface du livre intitulé : Remarques & observations diverses faites pendant un voyage aux Indes orientales2. « Lorsque l'aimant est à huit degrés ou un peu plus, de déclinaison Ouest, on peut marcher nuit & jour, sur les parages des Isles du Cap verd, & être sûr qu'on se trouve à l'Est de ces terres. » Je crois devoir observer ici, que cette assertion est très-dangereuse pour les navigateurs qui l'adopteront sans examen. Je m'occupai aussi des courants ; j'en trouvai un qui portoit au Sud-Ouest-quart-Ouest, & dont la vitesse étoit d'un peu plus d'un demi-mille par heure. Les différences observées entre la longitude indiquée par la montre marine, & celle de l'estime qui montoient à un degré, depuis notre départ de Ténériffe, annonçoient cet écart de route.
Tandis que nous fûmes parmi ces Isles, nous eûmes de petites brises qui varierent du Sud-Est à l'Est, & quelques calmes. J'en conclu que les Isles du Cap verd, ou sont assez étendues pour rompre la force du vent alisé, ou qu'elles sont situées au-delà de sa carriere, dans l'espace où l'on commence à trouver des vents variables, car Dampierre3 y rencontra un vent d'Ouest au mois de Février, époque où l'on suppose que le vent alisé, s'étend le plus vers l'équateur. Nous avions une chaleur étouffante, & il tomboit de la pluie par intervalles. Une blancheur terne qui sembloit tenir le milieu entre la brume & les nuages, domina presque toujours dans le ciel. En général, les régions du Tropique ne jouissent guères de cet atmosphère pur, qu'on observe dans les climats sujets aux vents variables ; & le soleil n'y brille pas d'une maniere aussi éclatante : il paroît que c'est un avantage ; si les rayons de cet astre n'y trouvoient point d'obstacles, il seroit impossible d'en supporter la chaleur. Les nuits y sont souvent belles & sereines.13.
Le 13, à neuf heures du matin, nous étions à l'entrée du port Praya (Isle Saint-Jago ;) nous y vîmes à l'ancre deux vaisseaux de la Compagnie Hollandoise, & un petit Brigantin. Comme la Découverte n'y étoit pas, & que nous avions consommé peu d'eau depuis notre départ de Ténériffe, je ne crus pas devoir relâcher & je cinglai au Sud. Nous prîmes quelques hauteurs du soleil pour déterminer le temps vrai : notre longitude évaluée par la montre marine, d'après cette observation étoit de 23d 48' Ouest. La petite Isle qui se trouve dans la Baye, nous restoit à l'Ouest-Nord-Ouest, à environ trois milles : ainsi sa longitude est de 23d 51'. La même montre, durant mon second voyage, avoit indiqué 23d 30'. Nous observâmes la latitude, & notre résultat fut 14d 51' 30'' Nord.

14.
Le lendemain du jour où nous quittâmes les Isles du Cap verd, nous perdimes le vent alisé Nord-Est, & nous n'atteignîmes que le 30 celui qui souffle de la partie Sud-Est ; le 30 nous étions par 2d de latitude Nord, & au vingt-cinquième degré de longitude Ouest.
Durant cet intervalle, 4le vent se tint le plus souvent dans la partie Sud-Ouest ; il souffla quelquefois avec force & par rafales, mais il ne forma ordinairement qu'une jolie brise. Les calmes furent en petit nombre & de courte durée. Entre le douzième & le septième parallèles Nord, le ciel fut en général sombre & nébuleux ; nous eûmes des pluies fréquentes, qui remplirent la plupart de nos futailles vuides.
Les pluies, & la chaleur étouffante qui les accompagne, produisirent très-souvent des maladies dans cette traversée. On a lieu de craindre de voir la moitié de son équipage sur les cadres, & les Capitaines des vaisseaux ne peuvent trop prendre de précautions ; ils doivent purifier l'air dans les entreponts avec le feu & la fumée ; ils doivent obliger les matelots à sécher leurs hardes, toutes les fois qu'on en trouve les moyens. On s'occupa de ces objets avec une assiduité constante à bord de la Résolution5 & de la Découverte. Ces oins produisirent sûrement de bons effets ; car il y avoit alors beaucoup moins de fièvres que dans mes deux premiers voyages : nous eûmes cependant le chagrin de trouver une multitude de voies d'eau sur toutes les œuvres mortes. La chaleur brûlante de l'air avoit ouvert les bordages, qui étoient si mal calfatés, qu'il introduisoient une grande partie de la pluie dans le corps du vaisseau. A peine y avoit-il un hamac qui ne fut pas mouillé ; & les Officiers qui occupoient la Sainte-Barbe, furent tous chassés de leurs postes. La soute aux voiles prit de l'humidité ; la plupart de nos voiles de rechange, n'ayant pu être séchées assez-tôt, essuyèrent des avaries considérables, & il fallut employer beaucoup de toile & de temps pour les réparer. Le même accident étoit arrivé à la soute aux voiles, durant mon second voyage ; je recommandai à ceux qui en étoient chargés, d'y prendre garde ; mais il paroît qu'ils négligerent mon ordre. Les calfats se mirent à l'ouvrage, dès que nous eumes gagné un ciel plus pur & plus fixe ; ils goudronnerent les entreponts, & l'intérieur des œuvres vives ; car je ne voulois pas mettre le vaisseau sur le côté, tandis que nous étions en mer.1 7bre
Le premier septembre, 6nous coupâmes l'Equateur par 27d 38' de longitude Ouest. Nous avions un bon vent du Sud-Est-quart-Sud ; & quoique je craignisse de tomber sur les côtes du Brésil en m'étendant au Sud-Ouest, je pris un aire de vent largue ; je reconnus ensuite que mes craintes étoient mal fondées ; car à mesure que nous approchions de ces côtes, nous trouvâmes le vent de plus en plus dans la partie de l'Est ; & lorsque nous fûmes à 10d de latitude Sud, nous pouvions nous avancer rapidement vers le Sud-Est.8.
Le 8, nous étions par 8d 57' de latitude Sud, c'est-à-dire, un peu au Sud du Cap Saint-Augustin, partie de la côte du Brésil : notre longitude déduite, d'un très-grand nombre d'observations de la lune, se trouvoit de 34d 16' Ouest ; & la montre marine indiquoit 34d 47'. Le premier résultat est d'un degré 43', & le second de 2d 14' plus à l'Ouest que l'Isle de Fernando de Noronha, dont la position a été assez bien déterminée dans mon second voyage7. J'en conclu que nous n'étions qu'à vingt ou trente lieues au plus du continent d'Amérique. La côte d'Amérique devoit se trouver à-peu-près à cette distance ; car nous n'avions point de sondes, & aucun indice ne nous annonçoit la terre. Cependant le Docteur Halley dit dans son voyage publié par M. Darymple8 Qu'il ne fit pas plus de cent deux milles, comptés sur le méridien de l'Isle de FERNANDO DE NORONHA, jusqu'à la côte du BRESIL ; & il paroît persuadé que les courans ne furent pas la seule cause du résultat de son calcul. Je pense qu'il s'est trompé, & que les courants l'avoient entraîné bien loin dans l'Ouest. J'ai lieu de le croire d'après nos observations ; car le 5, le 6 & le 7, nous avions trouvé des courants qui portoient à l'Ouest, & durant les vingt-quatre heures du 8, ils portoient au Nord : nous apperçûmes une différence de vingt-neuf mille, entre la latitude observée, & celle de l'estime. Enfin, jusqu'à ce qu'on ait fait à terre de meilleures observations astronomiques sur le gissement de la côte du Brésil, je supposerai que sa longitude est de 35d & demi, ou au plus de 36d Ouest.

- 6 8bre.
Il ne nous arriva rien de remarquable, jusqu'au 6 Octobre : le 6 par 35d 15' de latitude Nord, & 7d 45' de longitude Ouest, nous eûmes, durant trois jours consécutifs, de légers souffles de vent & des calmes qui se succéderent l'un à l'autre. Quelques jours auparavant, nous avions vu des albatrosses, des damiers, & d'autres pétrels ; nous apperçûmes alors tros pinguins qui nous firent sonder ; mais une ligne de cent cinquante brasses, ne donna point de fond. Un des canots qu'on mit à la mer, tua quelques oiseaux ; l'un de ces oiseaux étoit un pétrel noir, à-peu-près de la grosseur d'une corneille, à laquelle il ressembloit de tout point, exepté par le bec & les pieds ; il avoit quelques plumes blanches sur le col ; le dessous des plumes de l'aile étoit de couleur cendrée ; les autres plumes étoient d'un beau noir, ainsi que le bec & les cuisses.8.
le 8 dans la soirée, un de ces oiseaux que les matelots appellent noddie, se posa sur nos agrêts & fut pris ; il étoit un peu plus gros que le merle d'Angleterre, & presque aussi noir, excepté le haut de la tête qui étoit blanc, & qui ressembloit à une chevelure poudrée. Les plumes blanches commençoient à la racine du bec supérieur ; elles se prolongeoient & prenoient une teinte plus brune jusques vers le milieu de la partie supérieure du col, ou paroissoit la couleur noire, qui n'étoit plus interrompue par aucune ligne ; il avoit les pieds palmés, les cuisses noires, & un long bec de même couleur, qui ressembloit à celui du courlis : on dit que ces oiseaux ne s'éloignent pas beaucoup de terre ; je ne connoissoit point de terre plus voisine du parage où nous nous trouvions que l'Isle de Gough ou de Richmond, dont nous étions au moins à cent lieues ; mais il faut observer qu'on n'a guères parcouru la mer atlantique au Sud de ce parallèle, & qu'il y a peut-être beaucoup plus d'Isles, qu'on n'en voit de marquées sur les cartes.
Nous apperçûmes souvent, durant la nuit, ces animaux marins qui jettent de la lumière, & dont on a parlé dans mon premier voyage : il me sembla que je n'en avois jamais vu d'aussi gros à beaucoup près, & ils étoient quelquefois si nombreux, que nous en comptions une centaine au même moment.Ce temps calme fut suivi d'un vent frais du Nord-Ouest qui dura deux jours ; nous eûmes ensuite de légers souffles de vent l'espace d'environ vingt-quatre heures, après quoi le vent de Nord-Ouest reprit & souffla avec tant de force, que le 17 nous découvrîmes le Cap de Bonne-Espérance ; le lendemain nous mouillâmes dans la baye de la Table par quatre brasses, l'Eglise nous restant au Sud-Ouest-quart-Sud, & la pointe Verte au Nord-Ouest-quart-Ouest.
Dès que nous eûmes reçu la visite ordinaire de l'Inspecteur du port & du Chirurgien, j'envoyai un de mes Officiers chez le Gouverneur, M. le Baron de Plettemberg : à son retour, je saluai la place de treize coups de canon : on me rendit le salut avec le même nombre de coups.
Nous trouvâmes dans la baie deux vaisseaux françois ; l'un alloit dans l'Inde, & l'autre retournoit en Europe. Deux ou trois jours avant notre arrivée, un bâtiment de la même nation qui devoit appareiller pour la France, rompit son cable, & échoua à l'entrée de la baie où il périt. On sauva l'équipage ; mais la plus grande partie de la cargaison fut ensevelie dans les flots, ou, ce qui est la même chose, fut pillée & volée par les habitans de la colonie. Les Officiers françois m'apprirent ces détails, & les Hollandois ne pouvoient nier le fait ; mais, pour se disculper d'un crime qui déshonore un peuple civilisé, ils essayerent de rejeter la faute sur le Capitaine, qui, à ce qu'ils disoient, n'avoit pas demandé une garde assez-tôt.Dès que nous eûmes salué la place, je descendis à terre, accompagné de quelques-uns de mes Officiers, & j'allai voir le Gouverneur, le Lieutenant-Gouverneur, le Fiscal, & le Commandant des Troupes. Ces Messieurs me reçurent avec beaucoup de politesse, & le Gouverneur sur-tout me promit les divers secours que pourroit me procurer la Colonie. Il me permit d'établir notre observatoire à l'endroit que je jugerois le plus convenable, de dresser des tentes pour les Voiliers & les Charpentiers, & de faire paître notre bétail aux environs de notre camp. Avant de retourner à bord, je m'arrangeai avec un Munitionnaire, qui promit de fournir tous les jours du pain, de la viande fraîche & des légumes à mon équipage.22.
Le 22, on dressa les tentes & l'observatoire, & on commença le transport de diverses choses, dont nous avions besoin sur la côte. Cette opération ne put avoir lieu plutôt, parce qu'on exerçoit la milice de la place sur le terrein que nous devions occuper.23
Le lendemain, nous prîmes des hauteurs du Soleil, afin de déterminer le mouvement journalier de la montre marine ; ou, ce qui est la même chose, afin de reconnoître son écart. Ces opérations furent continuées chaque jour, toutes les fois que le temps le permit. Sur ces entrefaites, les calfats réparoient le vaisseau, & Messieurs Brandt & Chiron se disposoient à fournir à nos deux Bâtiments, les vivres & les munitions qui nous seroient nécessaires. Dès que les approvisionnemens destinés à la Résolutionfurent prêts, on les conduisit à bord.

- 26.
Le 26, le Vaisseau François, qui allait en Europe, appareilla, & nous lui remîmes des lettres pour l'Angleterre.27.
le lendemain, le Hampshire, Vaisseau de notre Compagnie des Indes, qui venoit de Bencouli, mouilla dans la baie ; il nous salua de treize coups de canon, & nous lui rendîmes son salut de onze coups.31
Il ne nous arriva rien de remarquable jusqu'au 31. Le 31, au soir, il s'éleva, dans la partie Sud-Est, un vent terrible qui souffla trois jours ; durant cet intervalle, le vaisseau ne put communiquer avec la terre. La Résolution fut le seul bâtiment mouillé dans la baie, qui ne chassa pas sur ses ancres. Nous ressentîmes à terre les effets de l'ouragan ; nos tentes & notre observatoire furent mis en pièces ; & peu s'en fallut que notre quart de cercle ne fût endommagé de maniere à ne pouvoir plus nous servir.3 9bre.
L'orage cessa le 3 Novembre ; & le lendemain, nous reprîmes nos travaux astronomiques.6.
Le Hampshire appareilla pour l'Angleterre le 6. J'y embarquai un de mes malades, que le Capitaine Trimble voulut bien recevoir. Je regrettai ensuite de ne lui en avoir pas donné deux ou trois autres, mais j'espérois alors leur rétablissement.10.
La Découverte arriva le 10 au matin. Le Capitaine Clerke me dit qu'il avoit fait voile de Plimouth, le 10 Août, & qu'il m'auroit joint une semaine plutôt, si le dernier ouragan ne l'eût pas éloigné de la côte. Sa traversée dura sept jours de plus que la mienne. Il eut le malheur de perdre un de ses soldats de marine, qui tomba dans les flots ; il ne fit pas d'autre perte d'ailleurs, & son équipage arriva sain & bien portant.
Il me représenta que son vaisseau avoit besoin d'être calfaté ; la Résolution étoit prête à rentrer en campagne ; &, afin de ne point perdre de tems, j'envoyai tous mes ouvriers à bord de la Découverte. Je donnai de plus au Capitaine Clerke tous les secours qui dépendoient de moi, pour qu'il obtint promptement le supplément de vivres & d'eau qu'il vouloit embarquer. J'ai déjà dit que les Boulangers du Cap m'avoient promis de travailler au biscuit nécessaire à la Découverte ; on m'avertit alors qu'ils n'avoient pas rempli leur engagement : ils prétendirent qu'ils manquoient de farine, mais le fait est qu'ils doutoient de l'arrivée de ma Conserve, & ils ne commencerent que lorsqu'ils la virent dans la baie.D'après la permission que m'accorda le Gouverneur, nous mîmes au pâturage notre bœuf, nos deux vaches avec leurs veaux, & le reste de notre bétail. On me conseilla de tenir, près de nos tentes, nos moutons qui étoient au nombre de seize : on les parquoit toutes les nuits. Celle du 13 au 14, des chiens s'étant introduits dans le parc, obligerent nos moutons de sortir de l'enceinte ; ils en tuerent quatre, & disperserent les autres. Nous en retrouvâmes six le lendemain, mais les deux béliers, & deux de nos plus belles brebis, manquoient. Le Baron de Plettemberg se trouvoit à la campagne, & je m'adressai au Lieutenant-Gouverneur, M. Hemmy, & au Fiscal. Ces Messieurs me promirent leurs bons offices. Je sais que les Hollandois se vantent de la Police du Cap : ils disent qu'il est presque impossible à l'esclave le plus adroit, & le mieux instruit des routes du pays, de se sauver ; cependant mes moutons échapperent à toute la vigilance des Officiers du Fiscal. Je fus réduit à employer la plus vile & la plus méprisable canaille de la Colonie ; je m'adressai à des hommes qui, si j'en crois ceux qui me les proposerent, auroient égorgé leur maître, brûlé des maisons, & enseveli sous les ruines des familles entieres pour un ducat ; &, après beaucoup de peines & de dépenses, je recouvrai mes moutons, excepté les deux brebis dont je parlois tout-à-l'heure. Je ne pus en avoir aucune nouvelle, & j'abandonnai mes recherches, lorsqu'on m'assura que devois être content d'avoir retrouvé mes deux béliers. L'un des béliers cependant, avoit été si maltraité par les chiens, qu'il ne sembloit pas devoir jamais guérir.
Le Lieutenant-Gouverneur voulut réparer la perte que je venois de faire ; il eut la bonté de m'offrir un des béliers d'Espagne, qu'il avoit tiré de Lisbonne ; je le refusai, convaincu que les béliers du Cap rempliroient également bien mon objet ; je reconnus ma méprise par la suite. M. Hemmy s'est donné beaucoup de peine pour transplanter au Cap les moutons d'Europe ; mais il n'a pu réussir : il attribuoit ce mauvais succès à l'opiniâtreté des habitans de la campagne, qui préferent les moutons du pays, à cause de leurs grosses queues, dont la graisse rapporte parfois plus d'argent, que n'en produit le corps entier d'un mouton d'une autre espece9. Ils croient que la laine de nos moutons d'Europe ne compenseroit point ce désavantage. Des hommes éclairés m'ont fait la même observation, & elle paroit fondée : car, en supposant que nos moutons donnassent au Cap une laine de la même qualité qu'en Europe, (l'expérience a prouvé le contraire) la Colonie manque de bras pour la manufacturer. Il es sûr que si l'on y importoit chaque jour des esclaves, la population de cet établissement seroit moindre que celle d'aucune autre partie habitée de l'Europe.

- Tandis que les vaisseaux se disposoient à reprendre la mer, quelques-uns de nos Officiers allerent voir les environs du Cap ; M. Anderson, qui étoit du nombre, m'a donné la relation suivante de leur petit voyage10.1776.
9bre.
16.
« Le 16, après-midi, je partis dans un chariot, avec cinq de nos Messieurs ; nous étions curieux d'examiner les environs du Cap. Nous traversâmes la grande plaine qu'on trouve à l'Est de la Ville. C'est par-tout un sable blanc, pareil à celui qu'on rencontre ordinairement sur les grèves. Elle ne produit que des bruyères, & d'autres petites plantes de différentes espèces. A cinq heures, nous dépassâmes une grosse Ferme, environnée de champs de bled, & de vignobles assez considérables ; elle est située au-delà de la plaine, presque au pied de quelques collines basses, où le sol commence à mériter la culture. Entre six & sept heures, nous arrivâmes à Stellenbosh, le meilleur des établissemens du pays, après celui du Cap.
Le Village ne contient pas plus de trente maisons ; il est situé au pied de la chaîne des hautes montagnes qu'on apperçoit à l'Est de la ville du Cap, & à plus de vingt milles. Les habitations sont propres : un ruisseau coule à peu de distance ; de gros chênes, plantés par les premiers Colons, y donnent de l'ombre, & l'ensemble forme un joli paysage au milieu de ces déserts. On voit, autour de la bourgade, des vignes & des vergers, qui semblent annoncer un sol très-fertile. L'air étant ici d'une sérénité extraordinaire, on doit peut-être attribuer au climat cette belle apparence.
Je passai la journée du lendemain à chercher des plantes & des insectes dans le voisinage de Stellenbosh : mes soins furent mal récompensés. Peu de plantes se trouvoient en fleur dans cette saison, & les insectes étoient rares. J'examinai le sol en plusieurs endroits ; c'est un argile jaunâtre, mêlé de beaucoup de sable. Les collines inférieures paroissent brunes, & je jugeai qu'elles sont composées d'une espèce de pierre de marne. Nous partîmes de Stellenbosh le lendemain au matin, & nous atteignîmes bientôt la maison, près de laquelle nous avions passé le 16. M. Cloeder, à qui elle appartenoit, nous avoit fait prier la veille de nous arrêter chez lui. Il nous accueillit avec beaucoup d'hospitalité, & d'une maniere qui nous surprit agréablement. La musique commença dès qu'on nous apperçut, & nous dinâmes au son des instrumens. Le repas fut très-élégant, vu la situation du lieu où il se donnoit. M. Cloeder nous montra ses caves, ses vergers & ses vignes. Tout cela, je l'avoue, m'inspira le désir de savoir, comment l'industrieux Hollandois peut faire naître l'abondance dans un endroit, où je pense que les autres Nations de l'Europe n'auroient pas même songé à s'établir.
Nous partîmes l'après-midi ; nous dépassâmes un petit nombre de plantations, dont l'une paroissoit très-considérable, & étoit disposée sur un plan nouveau. Le soir, nous arrivâmes à la première Ferme, qu'on trouve dans le district cultivé, appellé le Canton de la Perle. Nous apperçûmes en même temps Drakenstein, le troisieme district de la Colonie du Cap ; il occupe le pied des hautes montagnes dont j'ai parlé, & il contient plusieurs fermes ou plantations de peu d'étendue. ®19.
« Le matin du 19, je cherchai des plantes & des insectes ; je les trouvai presque aussi rares qu'à Stellenbosh ; mais les vallées m'offrirent plus d'arbrisseaux & de petits arbres, que les autres cantons dont j'avois fait l'examen.
L'après-midi, nous allâmes voir une pierre d'une grosseur remarquable, appellée par les habitans, Tour de Babylone, ou Diamant de la Perle11. Elle gît au sommet de quelques collines basses, au pied de laquelle notre ferme étoit située ; &, quoique le chemin ne fût ni escarpé, ni roide, il nous fallut plus d'une heure & demie pour y arriver. Elle est de forme oblongue, arrondie vers le haut, & elle se prolonge au Sud & au Nord. Les côtes Est & Ouest sont escarpées & presque perpendiculaires. L'extrémité méridionale est escarpée aussi, & c'est le point de sa plus grande hauteur. De-là elle s'abaisse doucement vers la côte du Nord, par où nous montâmes. Arrivés au sommet, nous vîmes à découvert tout le pays.
Je crois que sa circonférence est au moins d'un demi-mille ; car il nous fallut une demi-heure pour en achever le tour ; &, déduction faite pour le mauvais chemin, & pour nos pauses, c'est le résultat auquel je m'arrêtai. Si l'on veut que je compare à un objet connu, sa partie la plus élevée, c'est-à-dire, son extrémité méridionale, je crois sa hauteur égale à celle du Dôme de Saint-Paul. Cette masse, ou bloc de rocher, n'offre qu'un petit nombre de crevasses, ou plutôt de rainures qui n'ont pas plus de trois ou quatre pieds de profondeur, & une veine qui la coupe près de son extrémité Nord. Elle est de l'espèce de pierre appellée par les Minéralogistes, Saxum conglutinatum, & composée sur-tout de morceaux de quartz grossier, & de Mica, liés par un ciment argileux. La veine qui la traverse, est de la même substance, mais beaucoup plus compacte ; elle n'a qu'un pied de largeur & d'épaisseur : sa surface est divisée en petits quarrés, ou parallélogrammes, disposés obliquement : on diroit que c'est un ouvrage de l'homme ; mais je n'ai pas observé, si elle pénètre bien avant dans le bloc, ou si elle en attaque seulement la superficie. En descendant, nous trouvâmes au pied du rocher, un terreau noir, très-fertile & sur les flancs des collines, quelques arbres indigènes, de l'espèce de l'Oléa12, & d'une grosseur considérable. ®1976.
9bre.
20.
« Le 20 au matin, nous partîmes de la Perle, & nous suivîmes un chemin différent de celui que nous avions pris en allant. Nous traversâmes un pays absolument inculte ; mais, aux environs des collines du Tygre, quelques champs de bled frapperent nos regards. A midi, nous nous arrêtâmes dans un creux, afin de prendre quelques raffraîchissemens ; nous voulûmes nous promener autour du lieu de notre halte, & nous fûmes assaillis d'un grand nombre de mousquites, les premieres que je vis dans cette Colonie. Nous nous remîmes en route l'après-dîner, & nous arrivâmes le soir à la ville du Cap, bien fatigués des secousses de notre chariot. ®23.
Le 23, on rembarqua l'observatoire, l'horloge astronomique, &c. Par un milieu entre les résultats de plusieurs hauteurs correspondantes, prises avec le quart-de-cercle, nous conclûmes que l'horloge astronomique retardoit, par jour, de 1'8'',368 sur la révolution des fixes. Nous avions laissé au pendule la même longueur qu'il avoit à Gréenwich, où le retard journalier de l'horloge étoit de 4'' par jour, comparé au même mouvement.
En prenant un milieu entre les résultats de quinze jours d'observation, nous trouvâmes que la montre marine retardoit, en vingt-quatre heures, de 2'',261 sur le mouvement moyen du Soleil, c'est-à-dire, que son retard journalier étoit plus fort de 1'',052, que celui que nous avions observé à Gréenwich. Le 21, à midi, elle retardoit, sur le temps moyen, de 1d 20' 57'',66. Si l'on soustrait de cette quantité, celle 6' 48'',956, dont elle retardoit le 11 Juin à Gréenwich, plus la somme de ses retards journaliers ; le reste, c'est-à-dire, 1d 14' 8'', 704, ou 18d 32' 10'', sera la longitude de la Ville du Cap, tele qu'elle a été donnée par la montre marine. La vraie longitude de cette Ville, celle qui est déduite des Observations de MM. Masson & Dixon, est de 18° 23' 15'' ; mais, comme notre observatoire étoit situé à environ un demi-mille à l'Est du point où ils ont observé, il en résulte que l'erreur de la montre se réduit à 0d 8' 25''. Je puis donc conclure que cette montre avoit conservé sa régularité, depuis notre départ d'Angleterre, & que les longitudes qu'elle nous a indiquées pendant notre traversée, étoient plus approchantes de la vérité, que celles qu'on pouvoit obtenir par toute autre voie.
En partant de cette hypothèse, j'indiquerai, par approximation, la vitesse & la direction des courans que nous avons éprouvés, sur l'espace de mer que nous avons parcouru. Car, en comparant les latitudes & les longitudes conclues de l'estime & du calcul des routes, aux latitudes déduites de mes observations, & aux longitudes indiquées par la montre marine, je conclurai de leurs différences, & quelquefois avec assez de précision, les erreurs dont l'estime a été affectée à différentes époques, quelle qu'en ait été la cause. Mais, comme je veillois, avec le plus grand soin, à la maniere dont on jettoit le lock ; que je faisois toutes les compensations nécessaires, suivant la dérive du vaisseau, l'agitation de la mer, & les autres circonstances qui exigent qu'on y ait regard dans l'estime du sillage ; je ne puis attribuer qu'à l'effet des courans, les erreurs que j'ai reconnues dans cette estime, sur-tout lorsque l'erreur a été constamment dans le même sens, pendant plusieurs jours de suite.
Si, au contraire, un jour je trouve le vaisseau en avant de l'estime ; un autre jour, en arrière ; je suis fondé à croire que les erreurs, que je découvre, doivent être attribuées à des causes accidentelles, & qu'elles ne sont plus l'effet des courans. C'est ce qui me paroît avoir eu lieu dans notre traversée d'Angleterre à l'Isle de Ténériffe. Mais, depuis notre départ de cette derniere Isle, jusqu'au 15 Août que nous étions par 12d de latitude Nord, & 24d de longitude occidentale, le vaisseau se trouva, d'après nos observations, à 1d 20' plus à l'Ouest, que la longitude conclue de l'estime, ne l'indiquoit. Dans ce même parage, les courans prirent une direction opposée, & nous porterent dans l'Est, avec une vitesse évaluée à douze ou quatorze milles en vingt-quatre heures : leur effet ne cessa que lorsque nous fûmes parvenus au cinquieme degré de latitude Nord, & à 20d de longitude Occidentale. C'est le point où nous nous sommes trouvés le plus avancé dans l'Est, après avoir quitté les Isles du Cap-verd, jusqu'à ce que nous soyions portés dans le Sud ; & c'est celui où les vents ayant pris du Sud, nous changeâmes notre route, pour nous élever dans l'Ouest. Dans les deux ou trois jours qui suivirent, je ne m'apperçus pas que notre estime eût été altérée par l'effet d'aucun courant. Je jugeai que nous nous trouvions alors entre celui dont la direction ordinaire, si elle n'est pas constante, porte les Vaisseaux à l'Est sur la Côte de Guinée, & celui qui les porte à l'Ouest, vers les Côtes du Brésil.

- Nous n'éprouvâmes pas un effet considérable de ce dernier courant, jusqu'à ce que nous eussions atteint le second degré de latitude Nord, & le vingt-cinquieme de longitude Occidentale. De ce point, jusqu'au troisieme degré Sud, & au trentieme degré Ouest, dans l'intervalle de quatre jours, le Vaisseau fut porté de cent quinze milles, vers le Sud-Ouest-quart-Ouest, par delà le point indiqué par l'estime. Cette erreur est trop considérable, pour qu'elle puisse être attribuée à une autre cause, qu'à l'action d'un courant très-violent, dont la direction est vers cette partie. Arrivés à ce point, nous ne fûmes pas encore dégagés du courant ; nous continuâmes d'en éprouver l'effet, & nous reconnûmes seulement un changement dans sa direction, qui, dans la suite, prit du Nord, sans perdre de sa force du côté de l'Ouest. J'ai déja eu occasion de dire que les courans portent au Nord par le travers du Cap Saint-Augustin ; mais leur effet n'est plus sensible à vingt ou trente lieues de ce Cap : & je n'en éprouvai aucun autre, durant le reste de ma traversée. Les différences que nous trouvâmes ensuite, entre les résultats de l'estime, & ceux des observations, sont trop légères, pour qu'on puisse les attribuer aux courans, ainsi qu'on peut le voir dans la Table que je donne à la fin de l'Ouvrage.J'ai observé, dans la relation de mon second Voyage, 13 que, durant la traversée d'Angleterre au Cap, les courans se balancent les uns les autres : parce que, lors de ma seconde expédition, ayant coupé l'équateur vingt degrés plus à l'Est, nous fûmes plus long-temps exposés au courant Est ; ce qui balança le courant de l'Ouest. Je pense que si l'on passe la ligne à dix ou quinze degrés, à l'Est du méridien de Saint-Yago, on fera la même remarque.
Je conclurai de ces observations que si, après avoir dépassé les Isles du Cap-Verd, vous ne faites plus que quatre ou cinq degrés à l'Est, & que si vous coupez l'équateur par le méridien, ou à l'Ouest du méridien de Saint-Yago, vous devez vous attendre à trouver votre Vaisseau trois ou quatre degrés à l'Ouest de son estime, quand vous serez à dix degrés de latitude Sud. Mais si vous marchez beaucoup à l'Est, & si vous traversez la ligne, quinze ou vingt degrés à l'Est de Saint-Yago, votre bâtiment sera de la même quantité à l'Est de son estime : plus vous vous tiendrez dans la partie Est, plus votre erreur sera grande. Les Capitaines de quelques Vaisseaux de l'Inde, qui se sont trouvés sur la Côte d'Angola, dans un temps où ils s'en croyaient éloignés de plus de deux cents lieues, peuvent attester la vérité de cette observation.Durant notre traversée d'Angleterre au Cap, je n'ai laissé échapper aucune occasion d'observer la déclinaison de l'aimant ; j'ai fait mes calculs avec toute l'attention & l'exactitude qu'ont permis les circonstances : je les inférerai dans une Table particulière, ainsi que la latitude & la longitude, à l'époque de l'observation. Mes longitudes ne peuvent être fautives que d'un quart de degré, ou d'un demi degré au plus. Cette Table sera utile aux Navigateurs qui réforment leur estime par la déclinaison de l'aiguille aimantée. Elle donnera d'ailleurs à M. Dun des moyens de corriger sa nouvelle carte des variations, qui en a grand besoin.Il me paroît étrange que les Ecrivains, qui se fient le plus à la déclinaison de l'aimant, ne soient pas d'accord entre eux. L'un14 nous dit, comme je l'ai déjà observé, que si l'on a huit degrés de déclinaison Ouest, ou quelque chose de plus ; on peut, aux environs des Isles du Cap-Verd, faire de la voile la nuit & le jour, qu'on est sûrement à l'Est de ces terres. Un autre15 établit dans sa carte, que cette déclinaison se rencontre à quatre-vingt-dix lieues à l'Ouest des Isles du Cap-Verd. Une pareille différence démontre bien l'incertitude des deux calculs. Je suis persuadé que le premier a observé la déclinaison dont il parle dans son ouvrage ; mais il auroit dû remarquer, qu'à la mer, & même sur terre, les résultats des observations les plus exactes, ne sont pas toujours les mêmes ; que des boussoles différentes donnent des déclinaisons diverses ; qu'une seule boussole differe quelquefois d'elle-même, de ceux degrés, sans qu'on puisse en découvrir, & bien moins encore en détruire la cause.
Celui qui croira trouver la déclinaison, à un degré près d'exactitude, s'appercevra souvent combien il se trompe ; car, outre les imperfections qui peuvent se rencontrer dans l'instrument, ou dans la force de l'aiguille, il est sûr que le mouvement du vaisseau, l'attraction des serrures, ou d'autres causes qui ne sont pas encore connues, occasionnent fréquemment de bien plus grandes erreurs. J'avoue qu'on trouve la déclinaison de l'aimant, avec un degré d'exactitude plus que suffisant, pour déterminer la route du vaisseau ; mais que je nie positivement qu'on puisse la découvrir d'une maniere assez précise, pour déterminer la longitude à un degré, ou à soixante mille près.

  • 1. Me Capitaine Cook s'occupoit beaucoup de la discipline & de la santé de son équipage ; on voit, par son Livre de Lock, que du 4 au 10 d'Août, il fit faire deux fois l'exercice du canon & des petites armes, & qu'il fit nettoyer & fumer deux fois les entreponts.
  • 2. A bord du vaisseau de Sa Majesté l'Elisabeth depuis 1758 jusqu'en 1764, & imprimé à Londres en 1772.
  • 3. Voyages de Dampierre, Vol. III.
  • 4. Le 18, je plongeai, à soixante & dix brasses au-dessous du niveau de la mer, un baquet qui portoit un thermomètre ; il y resta deux minutes, & il en fallut trois autres pour le retirer. Le mercure, qui auparavant s'étoit tenu à 78 d en plein air, & à 79 à la surface de la mer, descendit sous les flots à 66. L'eau que rapporta le baquet contenoit, suivant la table de M. Cavendish, 1/25, 7 parties de sel, & celle que je pris à la surface de la mer, 1/29, 4. Cette dernière ayant été puisée après une pluie très forte, se trouva peut-être pour cela plus légère. Livre de Lock du Capitaine Cook.
  • 5. Voici les détails du Livre de Lock du Capitaine Cook. Le 14 aôut, on fit du feu dans l'archi-pompe & la calle, afin de donner de l'air aux parties basses du vaisseaux. Le 15, on exposa sur le pont les voiles de rechanges, & l'on fit du feu dans la soute aux voiles. Le 17, on nettoya & on fuma les entreponts, & on fit du feu une seconde fois dans la soute aux voiles. Le 21, on nettoya & on fuma les entreponts. Le 22, tous les hamacs furent exposés à l'air.
  • 6. On voit, par le Journal de M. Anderson, que l'après-dîner se passa à faire la vieille & ridicule cérémonie, de plonger dans la mer ceux qui n'avoient pas encore passé la Ligne. Quoique le Capiataine Cook permît de se conformer à cet usage, il l'a jugé trop minutieux pour en dire un mot dans son Journal, ou même dans son Livre de Lock. Pernetti, auteur d'un voyage fait aux Isles Malouines en 1763 & 1764, ne pensoit pas ainsi ; car la description de cette fête puérile y occupe dix-sept pages, & il lui a consacré un Chapitre entier, sous le titre de Baptême de la Ligne.
    En voici le commencement : « C'est un usage qui ne remonte pas plus haut que le voyage célebre de Gama, qui a fourni aux Camoëns le sujet de la Lusiade. L'idée qu'on ne sauroit être un bon Marin, sans avoir traversé l'Equateur, l'ennui inséparable d'une longue navigation, un certain esprit républicain qui regne dans toutes les petites sociétés, peut-être toutes ces causes réunies ont donné naissance à ces espèces de Saturnales. Quoi qu'il en soit, elles furent adoptées, en un instant, par toutes les Nations, & les hommes les plus éclairés furent obligés de se soumettre à une coutume dont ils connoissoient l'absurdité ; car, dès que le Peuple parle, il faut que les Sages se mettent à l'unisson ».
  • 7. Voyez la Traduction du second Voyage de Cook, tome IV, page 183.
  • 8. Page 11.
  • 9. « Ce qu'il y a de remarquable dans les moutons du Cap, c'est la longueur & l'épaisseur des queues, qui pesent quinze ou vingt livres » dit Kolben. L'Abbé de la Caille, qui ne trouve que des faussetés ou des inexactitudes dans l'ouvrage de Kolben, assure que la queue des moutons du Cap ne pese pas plus de cinq ou six livres. Voyage de la Caille, pag. 343. Si l'on peut compter sur la véracité de l'homme qui a donné ces détails au Capitaine Cook, il faut en conclure, que du moins, en ce cas-ci, Kolben est accusé d'exagération mal-à-propos.
  • 10. On trouve dans les Transactions Philosophiques, Vol. 66, page 268, la relation des trois Voyages, faits en 1772, 1773 & 1774, de la ville du Cap, dans les parties méridionales de l'Afrique, par M. François Masson, que le Roi d'Angleterre avoit envoyé au Cap de Bonne-Espérance, pour y découvrir de nouvelles plantes, & augmenter à son retour les jardins de Kew. Ce petit ouvrage de M. Masson renferme des détails très-curieux. M. de Pagès, qui étoit au Cap en 1773, a publié aussi des Remarques sur l'état de la Colonie ; il raconte, en outre, son voyage de False bay à la ville du Cap. Voyage vers le Pole Sud, p. 17 jusqu'à la page 32.
  • 11. Le Vol. 68, première partie, pag. 102 des Transactions Philosophiques, contient une Lettre de M. Anderson au Chevalier Pringle, qui décrit cette pierre remarquable ; les détailsenvoyésauCap,&lus à laSociété Royale, s'accordent avec ce qu'on en dit ici, mais ils sont plus étendus. M. Anderson écrivoit à M. Pringle, qu'il étoit allé la voir, pour remplir les désirs de M. Masson, qui vraisemblablement n'avoit pas eu le loisir de l'examiner assez. M. Masson se contente en effet, dans ses voyages, de dire, « qu'il y a deux rochers énormes sur le Perel Berg, que chacun d'eux lui semble avoir plus d'un mille de circonférence à sa base, & plus de deux cents d'élévation ; que leurs surfaces sont unies, sans crevasses ni ouvertures, qu'ils sont d'une espece de granit différent de celui qui compose les montagnes voisines ».
    Le Chevalier Hamilton a examiné l'échantillon du rocher joint à la Lettre, & il pense que cet immense bloc de granit, a vraisemblablement été soulevé par une explosion volcanique, ou par quelque autre cause de cette espèce. Voyez, dans les Transactions Philosophiques, la Lettre du Chevalier Hamilton, après celle de M. Anderson.
  • 12. On est étonné de ne pas trouver des détails sur la Tour de Babylone dans l'Ouvrage de Kolben, ou dans celui de l'Abbé de la Caille. Le premier observe seulement que c'est une haute montagne ; & le secondse contente de dire que c'est un très-bas monticule. La description de M. Anderson a donc le mérite de l'exactitude & de la nouveauté, & elle s'accorde avec les remarques de M. Sonnerat qui étoit au Cap en 1781. Voici le passage de cet Ecrivain : « La Montagne de la Perle mérite d'être observée ; c'est une des plus hautes des environs du Cap : elle n'est composée que d'un seul bloc crevassé en plusieurs endroits. » Voyage aux Indes, tom. 2. p. 91.
    M. Sonnerat nous apprend que M. Gordon, Commandant des Troupes au Cap, a fait dernièrement trois voyages dans l'intérieur du Pays : les observations de ce Général sont sans doute intéressantes, & le Public doit les désirer.
  • 13. Tom. I, p. 52 de la Traduction françoise.
  • 14. M. Nicholson.
  • 15. M. Dun.

Référence à citer

Capitaine COOK, Capitaine CLERKE, Capitaine GORE, Troisieme-voyage-de-Cook, archeographe, 2003. https://archeographe.net/Troisieme-voyage-de-Cook