L'Âge du Fer.

La transition entre l'Âge du Bronze et l'Âge du Fer se fait sans heurts. La Lorraine, le nord surtout, occupe une place importante grâce à ses ressources en fer, en cuivre et en sel. L'habitat ne change guère au premier Âge du Fer, la période de Hallstatt (environ 850-450 av. J.-C.) : il s'agit toujours d'une armature de poteaux fichés dans le sol, de murs en torchis sur clayonnage et d'une couverture végétale. Ces bâtiments, maison et greniers, sont accompagnés de silos et de fosses, et parfois d'une palissade comme à Koenigsmacker.1. La période Hallstatt fournit pour la première fois une activité industrielle dans la région. Le site de Florange Ste Agathe a livré deux fours de potiers, l'un circulaire, l'autre ovale. On y produisait une céramique non tournée qui comprend des bols, des jattes carénées, des urnes etc.2 Les mêmes formes se retrouvent dans la céramique découverte à Manom. Le monde funéraire est mieux connu. Les nécropoles tumulaires occupent des terres défrichées qui auraient pu servir à l'agriculture. Dans le pays thionvillois, on pratique d'abord l'incinération. A Rustroff Bruchwaedchen, dans le tumulus A, daté du Hallstatt Moyen / Final, l'urne qui contenait les cendres était placée dans un espace délimité par des murets en pierres sèches, mais le tertre contenait aussi 15 inhumations, dont onze avec des bijoux. Le centre du tumulus C était constitué de la même façon mais le sol sur lequel reposait l'urne était empierré ; là aussi, le tumulus contenait des inhumations, que l'on date du Hallstatt Final. A Mondelange Schemerten, les sépultures sont recouvertes d'un tumulus au Hallstatt Ancien. Cette pratique se poursuit à la phase moyenne. On relèvera les neuf sépultures dans un enclos de la fin de la période ; l'une d'elles était une tombe à char à deux roues, un type de sépulture prestigieux réservé à l'aristocratie3.

Au VIe s., l'inhumation supplante l'incinération : le défunt est posé sur un dallage, dans une fosse centrale ou dans un coffre de bois ; l'ensemble est recouvert d'une masse de pierres et de terre. A cette époque et à La Tène Ancienne, on réaménage souvent d'anciens monuments.Sans rupture avec la phase précédente, le second Age du Fer, la période de La Tène, marque l'apogée du monde celte (environ 450-50 av. J.-C.). Des bourgades fortifiées cumulent les fonctions économiques, politiques et religieuses. Il faut souligner qu'à cette époque deux tribus se partagent la région : les Médiomatriques au sud et les Trévires au nord, mais aussi à l'ouest et à l'est. Ces peuples, comme partout dans l'aire celte, sont dirigés par une aristocratie riche et puissante. L'habitat, durant la période de La Tène, conserve les traits, désormais familiers, d'une architecture de terre et de bois, et la même juxtaposition de bâtiments et de silos creusés dans le sol que précédemment. Les enclos sont peut-être plus fréquents, comme à Puttelange-les-Thionville, ou sur le site de Terville Géric qui comprenait plus de 40 silos enterrés, un grand enclos rectangulaire et un édifice extérieur. Le site le plus spectaculaire, Thionville Langfeld, à cheval sur les bans de Thionville et de Terville, montre la véritable innovation de cette période : les constructions, toutes à poteaux, sont à peu près organisées selon une même orientation. Elles comprennent des greniers, mais surtout de grandes bâtisses. L'une est de plan carré4 et à trois nefs ; une autre est rectangulairet à deux nefs et fut remplacée par un édifice plus grand, mais d'un plan semblable5. A la fin de La Tène, la région semble bien développée. Les relations commerciales se font avec les régions environnantes et avec le monde méditerrannéen, comme en témoigne la découverte de Basse-Yutz. Le dépôt comprenait quatre vases, deux cruches et deux stamnoi en bronze, qui furent découverts ensemble en 19276. Ce service est, à tous égards, exceptionnel dans la civilisation du début de La Tène. D'une part, les vases sont d'origines différentes : les stamnoi viennent d'Etrurie et les cruches sont des créations d'artisans celtes. Ceux-ci, d'autre part, ont fait preuve d'une grande habileté et d'un véritable talent artistique, mêlant des motifs géométriques, végétaux, animaliers et humains qu'ils surent relever d'émail et de corail.[->http://www.britishmuseum.org/explore/highlights/highlight_objects/pe_prb.... A la phase finale de La Tène7, l'artisanat prend une importance considérable et développe de véritables métiers. La verrerie apparaît, des potiers travaillent à Yutz, et l'on rencontre des traces d'industrie métallurgique à Hayange Fond de la Navette. Les échanges commerciaux bénéficient d'un réseau routier étendu que l'époque romaine transformera selon ses besoins.Les nécropoles de la période de La Tène sont fréquentes. Celle de Zoufftgen Fliehburg comprenait 27 tumuli dans une enceinte faite d'une levée de terre et d'un fossé. Les inhumations sous tumulus se poursuivent, souvent ajoutées à celles de la période précédente. Quelques tombes à char ont été décrites, dont celles de Kerling-lès-Sierck et du tumulus 19 de la nécropole tumulaire de Kerling Neuwiese ; le site de Mondelange Schemerten en a livrée une autre.

• 1. Les fouilles retrouvent souvent des traces de ces habitats, sous la forme de trous de poteaux et d'excavations comblées : ainsi à Cattenom Sentzich, Gavisse, Rodemack Steinwiese, Koenigsmacker, Yutz, Gandrange, Boulange Le Douaire.
• 2. Cette activité, on le verra plus loin, connaîtra un grand essor à la période romaine.
• 3. La Lorraine représente la frange occidentale de la zone des tombes à char d'Europe centrale.
• 4. 10, 20 m de côté.
• 5. Le premier bâtiment faisait 6, 35 m sur 4, 05 m ; celui qui lui succéda avait 7, 10 m de long et 5, 20 m de large.
• 6. Ces vases furent achetés par le British Museum, où ils sont exposés aujourd'hui.
• 7. 110-50 av. J.-C.