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Le monde rural.
A proximité des deux branches de la voie romaine ont été répertoriés de nombreux établissements gallo-romains1, dont un certain nombre sont des villae.
Ces édifices se rangent dans une catégorie déjà bien connue dans tout l'est de la Gaule : un grand bâtiment avec galerie en façade et une tour à chaque extrémité ; au devant s'étend une vaste cour2. C'est le modèle que reproduit, en taille réduite et de manière simplifiée, l'aedicula trouvée à Fontoy. On y voit les éléments caractéristiques de ces bâtiments. La façade est composée d'une galerie en avant-corps traîtée en portique sur toute la longueur3 ; de part et d'autre s'avance une tour d'angle à pignon4. A l'arrière, le corps principal du bâtiment s'impose par une élévation plus haute d'un étage ; sa toiture en bâtière est couverte d'ardoises ou de tuiles, ces tegulae que l'on rencontre si fréquemment dans les prospections. L'ensemble est construit en moellons, que l'on a figurés par un quadrillage sur les côtés et à l'arrière de la miniature5. Les vestiges de ces constructions représentent la pars urbana de l'établissement, réservée à l'habitation du maître et de sa famille. Certaines semblent assez vastes et d'un certain luxe : mosaïques, marbre, bains, hypocaustes, canalisations d'eau... y apportent le confort et l'apparat de la maison romaine6. L'opulence de l'habitation du maître n'excluait pas que certaines salles y soient consacrées à des activités nécessaires au domaine. Une salle de la villa de Halstroff Hurressel servait ainsi d'atelier : on y a retrouvé quantité d'objets en fer (chaîne, poinçons, herminette, hypposandales pour bétail, faux, fourches, clous de diverses tailles etc.), ainsi que des éléments de harnachement en cuivre. Au devant du bâtiment principal s'étendait une vaste cour. On en a retrouvé des éléments à Roussy-le-Village. La galerie de la bâtisse7, encadrée par deux tours d'angle, donnait sur le côté nord de la cour ; à l'est de celle-ci, deux bâtiments8 s'adossaient au mur de la propriété9, lui-même longé d'un fossé. La grande villa à l'ouest de Haute-Yutz, de la fin du Ie-début IIe s., avait aussi adopté cette disposition.Le domaine qui dépendait de la villa urbana était plus étendu, bien qu'on n'en saisisse jamais l'emprise. Néanmoins, un bon nombre des sites où l'on a retrouvé des tuiles et des moellons d'époque romaine doit représenter des annexes de ces exploitations rurales. La vie quotidienne se déroule ainsi sous nos yeux, au fil des vitrines, avec sa vaisselle, ses outils, et les éléments de confort et de parure. ++++
- 1. Deux villae à Basse-Rentgen, 4 à Boust, deux à Garche... On connaît aussi des établissements qui sont éloignés de la voie, mais ils étaient peut-être desservis par des routes secondaires, dont le réseau a disparu.
- 2. A ce type appartiennent la villa St Ulrich et celle de Sarreinsming, par exemple : Cf [->art103]
[->art79] sur archeographe. - 3. Des morceaux de colonnes ont été retrouvés à la villa de Waldweistroff, les vestiges, vraisemblablement, d'une galerie de ce genre.
- 4. La villa de la forêt de Laumesfeld avait quatre tours d'angle. Cette partie peut prendre l'aspect de pavillons rectangulaires plutôt que de tours carrées.
- 5. Quant à l'objet lui-même, on peut s'interroger sur sa destination. Il ne s'agit pas d'une véritable maquette, ébauche d'un projet d'architecture. L'appellation aedicula, donnée par les archéologues, se réfère à la religion : une aedicula est une sorte de petit sanctuaire ressemblant à un temple où l'on conservait les images des ancêtres, des lares et des divinités domestiques. L'objet découvert à Fontoy ne répond guère à cet usage. Il n'est pourtant pas unique : le musée d'Histoire et d'Art de Luxembourg en possède trois, qui proviennent tous du Titelberg, le grand oppidum des Trévires. En l'absence d'autre proposition, on s'en tiendra au commentaire de G. Thill, qui parle de curieuses stèles-maisons qui sont assez fréquentes chez nous (c'est-à-dire au Luxembourg, en pays trévire. NDR) dans les régions qui touchent au pays des Médiomatriques. Cabanes, demeures ou sanctuaires en miniature, elles semblent avoir servi de laraires ou de couronnement à urne. Les ouvertures pratiquées dans leur base et permettant des libations, parlent en faveur de cette hypothèse. On remarquera que Fontoy est sans doute déjà en pays trévire, sinon juste à sa limite. Les exemplairesdu Titelberg diffèrent tous de celui du Musée de la Tour aux Puces, mais tous évoquent la pars urbana d'une villa romaine.
Cf : La civilisation romaine de la Moselle à la Sarre, catalogue de l'exposition du Musée du Luxembourg à Paris, octobre 1983, p. 134.
THILL Gérard, Les époques gallo-romaine et mérovingienne au Musée d'Histoire et d'Art de Luxembourg, 1972, p. 8 et pl. 16 et 17. - 6. Bains à la villa de Boust Heidentausch, hypocauste à celles de Bettelainville Le Grand Mooracker, de Valmestroof Hamshof et de Kirschnaumen, marbre blanc sur les murs d'une salle de celle de Halstrof Hurressel, bains et hypocaustes dans une des villae de Haute-Contz, peintures murales polychromes dans l'autre, peintures murales à Ritzing, mosaïque à la Audun-le-Tiche Le Château. Les vestiges de conduites d'approvisionnement en eau ne sont pas rares : aqueduc en pierres à Ritzing, conduites en plomb à Waldweistroff. L'aqueduc de la villa d'Audun-le-Tiche Le Château, construit en blocs de taille jointoyés à l'argile, y conduisait les eaux d'une des sources de l'Alzette.
- 7. C'était une construction de grande taille (30 x 55 m environ).
- 8. Ils sont sensiblement de même taille (18 x 10,30 m), et comprennent chacun une grande pièce qui commande une salle latérale.
- 9. Conservé sur près de 60 m.