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Divinités et religion.

Toute cette vie se déroulait sous le regard des dieux. Nous avons déjà parlé, dans un autre contexte, des représentations d'Epona et des groupes de Jupiter cavalier terrassant un monstre anguipède. La région n'a guère livré de sanctuaires, si ce n'est à Audun-le-Tiche La Faïencerie, où l'on a retrouvé l'enceinte d'un temple et de nombreuses sculptures de divinités1, mais on en connaît d'importants non loin de là2. A Puttelange-lès-Thionville Burg, cependant, on a pu étudier deux sources aménagées ; celle de l'ouest avait des parois en marbre blanc. C'était peut-être un sanctuaire dédié aux divinités des sources, un culte fréquent dans l'est de la Gaule3. A Kirschnaumen, un bâtiment4, accompagné d'une statue drapée de Diane5 et de l'inscription DIAN(A)E, est peut-être le vestige d'un temple. A Fontoy, des figurines en terre cuite à l'effigie de divinités, ainsi qu'une tête de Mithra, des stèles d'Epona et un Amour ailé, attestent un lieu de culte. Médaillon en bronze avec la représentation de Sucellus. IIIe s. Hettange-Grande.Plaque de harnachement en bronze représentant le dieu des animaux. IIIe s. Hettange-Grande. Nous saisissons mieux le monde religieux grâce à des découvertes fortuites. Rome ne chercha pas à chasser les croyances des peuples qu'elle conquérait. Les divinités gauloises se glissèrent dans un costume romanisé. Ainsi, dans la vallée de la Canner, la sculpture rupestre de Klang Le Trou d'Enfer, sur le rocher du Nonnenfels, occupe-t-elle un lieu de culte plus ancien. Haute de 1,28 m, elle représente, debout et de face, une femme nue dont la main droite élève un objet et la main gauche ce qui pourrait être un sac ; la divinité est accompagnée d'un cervidé6,Et, au IIIe siècle, certaines statuettes de bronze d'Hettange-Grande se réfèrent encore au panthéon celte. Klang, Le Trou d'Enfer, au Nonnenfels.Klang. Sculpture rupestre du Trou d'Enfer.Klang. Sculpture rupestre du Trou d'Enfer.Lion androphage. I-IIe s. ap. J.-C. Hettange-Grande.Lion androphage. I-IIe s. ap. J.-C. Hettange-Grande. Le lion androphage, de très belle facture, qu'on a retrouvé à Hettange-Grande Suzange est un superbe exemple de l'amalgame religieux de la civilisation gallo-romaine. Le loup, vénéré par les Celtes, devient ici un lion, symbole de la purification des âmes7. Lion androphage. I-IIe s. ap. J.-C. Hettange-Grande.Lion androphage. I-IIe s. ap. J.-C. Hettange-Grande. Ce thème est d'ailleurs repris, dans le musée même, sur un objet de la vie courante, en bronze, représentant un lion dévorant un sanglier. Poignée de clef en bronze. IIIe s. Hettange-Grande. Les principaux dieux romains sont naturellement très présents, en particulier Mercure8. La stèle votive que présente le Musée est dédiée à ce dieu très important en Gaule. Elle provient de Gandrange Boussange, où elle fut découverte lorsqu'on détruisit l'église romane. Elle date du IIe s. et porte l'inscription
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que l'on peut restituer comme suit : In honorem Domus Divinae Deo Merurio Hicilus Feralis ex voto Parcilis Pluncus votum posuit merito9. Elle témoigne du culte que l'on rendait à la maison impériale, du vivant de l'Empereur ; partout dans l'Empire, cette dévotion symbolisait la fidélité à l'autorité de Rome. Stèle votive à Mercure de Gandrange Boussange.Statuette en bronze de Mercure. Hettange-Grande. Les bronziers fabriquaient de nombreuses figurines pour satisfaire la dévotion populaire. Le musée en présente plusieurs qui viennent du site de Hattange-Grande Auf Khem. Statuette d'Apollon en bronze. Hettange-Grande.Statuette en bronze de Jupiter. Hettange-Grande. Les amulettes montrent, comme toujours, combien la religion verse facilement dans la superstition.

Voyageurs et militaires importèrent aussi dans la région des cultes orientaux10. Serpent ondulant en bronze. Halstroff.Tête d'une statuette en terre cuite représentant un prêtre d'Isis. IIIe s. Hettange-Grande. Le christianisme fit son apparition assez tôt dans notre région. Le Musée en donne un exemple avec le fragment d'une pyxide du IVe s. découverte à Basse-Yutz11 : son décor est une frise sculptée qui reprensente l'entrée du Christ à Jérusalem le jour des Rameaux. La nouvelle croyance devait supplanter la religion gréco-romaine et les cultes de salut qui avaient déferlé sur l'Empire ; elle allait ouvrir à des temps nouveaux. Pyxide. IVe s. Basse-Yutz.

  • 1. Un Jupiter cavalier à l'anguipède, des têtes de Junon et de Minerve, un Hermaphrodite.
  • 2. Par exemple le Hérapel, à Cocheren.
  • 3. Cf déjà sur le territoire allemand [->art22] sur archeographe.
  • 4. Dimensions : 12 m sur 7.
  • 5. Esp 4469.
  • 6. Esp 4422. Certains pensent que la femme tient dans la main droite une corne d'abondance. La statue a été christianisée par des croix et défigurée à une date inconnue. Ces sculptures rupestres sont fréquentes en pays médiomatrique et trévire, et l'on remarquera qu'elles sont souvent en rapport avec des sources. A Klang, une source coule aussi à proximité du rocher sculpté. Cf [->art75].
    [->art47] sur archeographe.
  • 7. Il peut aussi se rattacher au monde de la mort, dont il représente la puissance dévorante. On connaît en Gaule un certain nombre de ces lions dévorants : une statue de Bavai représente le fauve avec une tête de bélier (Esp 3980) ; il tient dans ses pattes une tête de taureau sur une sculpture trouvée près de Boulogne (Esp 3974). A Trèves, le lion tient une tête d'homme entre ses griffes sur un groupe roman qui reprend le thème (Esp 5008).
  • 8. A Hettange-Grande, un monument, aujourd'hui disparu, portait une inscription votive à Mercure et Rosmerta : (MERC)VRIO (ET ROS)MERT(AE) V(OTVM) S(OLVIT)
  • 9. Soit : En l'honneur de la Maison Divine, au dieu Mercure, Hicilus Feralis, selon son vœu. Parcilis Pluncus a accompli le vœu comme il convient.
  • 10. Têtes de Mithra à Fontoy et à Koenigsmacker, insérée dans le mur de l'église, statuette d'Isis à Audun-le-Tiche.
  • 11. L'original a disparu, mais on en avait heureusement fait un moulage qui est présenté ici.